Dans la peau des premiers baleiniers basques

Comment de simples pêcheurs à la morue du Pays basque sont-ils devenus, au XVIe siècle, les maîtres de la chasse à la baleine en Amérique du Nord ?

De Rédaction National Geographic
Publication 3 août 2018, 11:10 CEST
Illustration de la pêche d’une baleine à bord d’une chalupa, réalisée pour le numéro d’août 2018 ...
Illustration de la pêche d’une baleine à bord d’une chalupa, réalisée pour le numéro d’août 2018 du magazine National Geographic.
PHOTOGRAPHIE DE Fernando G. Baptista

En allant pêcher la morue en Amérique du Nord, les navigateurs basques du XVIe siècle ont découvert des zones de pêche à la baleine. Au plus fort de la période baleinière, dans les années 1560 et 1570, à Red Bay, située dans l’actuelle province canadienne de Terre-Neuve-et-Labrador, à chaque saison, un millier de Basques chassaient sur quinze navires ou travaillaient dans l’un des quinze fondoirs qui transformaient la graisse des baleines en huile. Ces Européens dominèrent les pêcheries du Nord jusqu’au siècle suivant.

Pour attraper les cétacés, des éclaireurs patrouillaient à bord de petites embarcations, appelées chalupas. Quand ils repéraient des baleines dans le détroit de Belle-Isle, qui clôt la Red Bay, ils faisaient signe aux autres membres d’équipage. Les patrons des chalupas, dont chacune transportait en général six rameurs et un harponneur, ordonnaient à leur équipage de ramer vite – mais discrètement – vers les cétacés qui remontaient à la surface ou qui s’étaient endormis.

Une fois l’animal tué, le cadavre de la baleine flottait : sa transformation pouvait donc commencer sur l’eau. Le lard était ensuite changé en huile dans des fondoirs installés à terre ; puis l’huile était renvoyée vers les bateaux, dans des tonneaux flottants. La précieuse substance, issue essentiellement des baleines à fanons, pouvait rapporter l’équivalent actuel de plusieurs millions d’euros par cargaison.

Les marins basques sont devenus au fil du temps des experts de la chasse à la baleine, mais leurs navires ne résistaient pas toujours aux traversées. Des témoignages de marins devant les tribunaux et des demandes d’indemnisation révèlent la triste fin d’un de leur bateau : le San Juan. Poussé par des vents violents, il se fracassa sur les rochers avant son départ de Red Bay, en 1565, mais l’équipage survécut.

En 1978, une chercheuse canadienne, Selma Huxley Barkham, a étudié les archives basques qui détaillaient le sort du San Juan. Son travail a permis de localiser l’épave dans la Red Bay. Ensevelie sous des algues et de la vase, la coque aplatie du navire avait été préservée pendant des siècles par les eaux glaciales. La première planche remontée du fond était en chêne, essence qui n’était pas originaire de la région, mais utilisée par les Basques. Le site de Red Bay, témoignage exceptionnel de la période faste des baleiniers, est désormais inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco.

Dans le numéro d’Août 2018 du magazine National Geographic, immersion en Amérique du Nord avec les baleiniers basques du XVIe siècle.

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