Les 7 victoires environnementales de l'année 2020
De la multiplication des véhicules électriques aux nouvelles mesures visant à protéger les océans, ces tendances augurent de belles perspectives pour l'avenir.
Le 07 juillet 2020, la nuit tombe sur la vallée du Yosemite alors que les étoiles constellent le ciel du Half Dome (au centre, à gauche) et de la Chute Nevada (en bas, à droite). Après la fermeture du parc pendant deux mois et demi à cause de la pandémie, la faune s'est emparé des zones habituellement fréquentées par les visiteurs. Le parc est désormais ouvert pour les visiteurs ayant réservé avec une restriction des services et de l'accès aux infrastructures.
En 2020, les feux de forêt ont ravagé l'Australie et l'ouest des États-Unis, l'Amérique Centrale et la Côte du Golfe ont été parcourus par de violents ouragans, des nuées de criquets ont envahi la Corne de l'Afrique et une nouvelle maladie mortelle est passée de l'animal à l'Homme en mettant à mal la vie telle que nous la connaissions.
Avec cet air de fin du monde entonné par la plupart des médias, comment vous reprocher d'avoir le sentiment que le monde naturel est à nos trousses, même à l'heure où les scientifiques multiplient les avertissements quant aux maux que nous lui infligeons. La biodiversité est toujours en chute libre, la déforestation en Amazonie est à la hausse et d'après un nouveau rapport, les plans de réduction des émissions carbone sont encore trop peu ambitieux pour atteindre les modestes objectifs fixés par l'accord de Paris sur le climat ; duquel, rappelons-le, les États-Unis sont officiellement sortis le 4 novembre.
Pourtant, même les années les plus difficiles comportent leur lot de bonnes nouvelles. Quand bien même l'administration Trump continue de vendre des concessions pétrolières sur les terres de l'Arctic National Wildlife Refuge, un écrin de nature du North Slope de l'Alaska, elle a toutefois refusé de délivrer une licence au projet Pebble Mine dans le sud de l'État, tuant ainsi dans l'œuf cette initiative controversée.
Hormis les efforts individuels, un espoir se dessine également dans les tendances au sens large. L'opinion publique vis-à-vis du changement climatique se rapproche de la science, même aux États-Unis, et des voix plus jeunes autrefois marginalisées se font finalement entendre. Le secteur privé commence à percevoir l'intérêt des investissements respectueux de l'environnement. Alors que certains gouvernements débloquent des fonds sans précédent pour désamorcer l'une des pires crises économiques du siècle, ils entrevoient l'opportunité de lutter dans le même temps contre le changement climatique.
Aux heures les plus sombres de la pandémie, il subsiste un sens indéniable du possible, une lueur d'espoir pour 2021 et au-delà incarnée à la perfection par ces sept avancées et tendances de l'année 2020.
1. LA VICTOIRE DES GRANDS ESPACES
Cette année, contraints de passer le plus clair de notre temps en intérieur, nous avons porté un regard nouveau sur la nature comme un lieu de refuge et de divertissement. Aux États-Unis, l'adoption du Great American Outdoors Act au mois de juillet a rappelé aux Américains que la protection de leurs parcs nationaux était un sujet sur lequel ils pouvaient tous s'entendre. C'est la première fois depuis les années 1950 que le Congrès américain consent à une telle dépense budgétaire au profit des parcs nationaux, dont la plupart ont de lourds arriérés liés à leur entretien. La loi prévoit également des fonds pour les forêts, les refuges et les futures acquisitions de terres. Au total, ce sont près de 10 milliards de dollars qui ont été alloués aux territoires nationaux.
2. L'AVÈNEMENT DE LA VOITURE ÉLECTRIQUE
Ces dix dernières années, les voitures électriques ont gagné en popularité grâce à l'amélioration des technologies, la baisse des prix et les subventions gouvernementales. En 2010, seuls 17 000 véhicules électriques parcouraient les routes de notre planète. En 2019, ce chiffre était estimé à 7,2 millions, dont la moitié en Chine. Les nouveaux engagements pris cette année par les différents chefs d'État devraient aider le reste du monde à rattraper son retard. Le Royaume-Uni a annoncé qu'il allait interdire la vente de nouveaux véhicules fonctionnant à l'essence ou au diesel dès 2030 et la Californie à l'horizon 2035. L'objectif le plus ambitieux est celui de la Norvège en 2025, mais pour un marché nettement plus restreint.
Fin octobre cette année, les nouveaux véhicules électriques de Volkswagen étaient présentés à la presse. Le constructeur allemand va investir des milliards de dollars dans le développement de véhicules plus respectueux de l'environnement au cours des cinq prochaines années.
L'industrie suit la tendance. Le plus grand constructeur de voitures au monde, l'Allemand Volkswagen, a probablement pris le plus grand engagement financier de l'année 2020 en annonçant qu'il allait dépenser 86 milliards de dollars pour rendre ses voitures plus vertes au cours des cinq prochaines années. General Motors a également l'intention d'investir des milliards dans la production de véhicules électriques. Amazon s'est engagé à mettre sur la route 100 000 véhicules de livraison électriques d'ici 2030 et le service postal des États-Unis pourrait lui aussi intégrer des voitures électriques à sa prochaine flotte de camions de livraison.
3. LA LUMIÈRE AU BOUT DU TUNNEL DES ÉNERGIES FOSSILES
Début mars, les divergences entre la Russie et l'Organisation mondiale des pays exportateurs de pétrole (OPEP) ont généré une surabondance de l'or noir sur les marchés internationaux. En avril, alors que la pandémie venait de mettre le monde sur pause en un claquement de doigts, le prix du pétrole a atteint un niveau historiquement bas, prenant de court les producteurs qui n'avaient plus de solutions de stockage. Cet effondrement combiné aux forces du marché existantes a contraint 36 compagnies pétrolières à se déclarer en faillite, un record depuis 2016. Les projets majeurs de construction d'oléoducs comme le Keystone XL sont restés en suspens cette année. Alors que les prix du gaz naturel sont également tombés à des niveaux historiquement bas, leur consommation a augmenté et supplanté le charbon qui a connu une baisse de production de 30 % aux États-Unis.
Ces éoliennes et ces panneaux solaires produisent de l'énergie renouvelable à Desert Hot Springs en Californie. Un nombre record de projets éoliens et solaires ont vu le jour cette année.
À travers le monde, les énergies renouvelables connaissent une croissance rapide. Au cours du premier semestre de l'année 2020, la part du solaire et de l'éolien dans la génération d'électricité a augmenté de 14 % pour atteindre presque 10 % de l'électricité produite mondialement, une première. D'après les experts, si l'on veut satisfaire les objectifs climatiques, la transition vers les énergies renouvelables devra se faire encore plus rapidement.
4. COUP DE CHAUD SUR WALL STREET
Déjà avant la COVID-19, le PDG de BlackRock, Larry Fink, premier gestionnaire de portefeuille au monde, annonçait à ses investisseurs qu'ils devraient tôt ou tard prendre en compte le changement climatique et que le plus tôt serait le mieux. Un rapport publié en février montre que la plupart des plus de 400 investisseurs sondés intégraient le risque climatique à leur prise de décision.
Ces derniers mois, les six plus grandes banques des États-Unis (notamment JPMorgan Chase, Bank of America et Wells Fargo) ont annoncé qu'elles ne financeraient pas les forages de l'Arctic National Wildlife Refuge, alors même que l'administration Trump s'empresse d'y vendre des concessions. Après avoir prêté des billions de dollars au secteur des énergies fossiles pendant des années, la banque JPMorgan Chase déclarait au mois d'octobre qu'elle positionnerait désormais ses investissements de façon à aider le monde dans sa marche vers les objectifs fixés par l'accord de Paris sur le climat. Comme le rapportait Bloomberg le mois dernier, il est même devenu tendance pour l'élite d'investir dans le climat.
Alors que Joe Biden s'apprête à accéder au pouvoir, les grandes banques s'attendent à plus de contrôle quant à l'impact de leurs actions sur le changement climatique. Le président élu a déclaré qu'il allait prendre un décret présidentiel exigeant des sociétés cotées en bourse qu'elles dévoilent leurs émissions et s'expriment sur la façon dont elles pourraient influencer le changement climatique. Le mois dernier, le Royaume-Uni révélait son intention d'imposer une transparence similaire.
5. LE RÉTABLISSEMENT DES BALEINES
Au large de la Géorgie du Sud, à quelques encablures au nord de l'Antarctique, les scientifiques ont aperçu plus de baleines bleues qu'ils n'en avaient vu depuis avant que la chasse de l'espèce soit interdite en 1966. Ce ne sont pas moins de 55 baleines bleues qui ont été identifiées cette année après 50 ans de rares observations dans la même région.
Les baleines bleues sont les plus grands animaux de la planète et elles ont presque été chassées jusqu'à l'extinction d'après les données de la Commission baleinière internationale. Dans la première moitié du 20e siècle, près de 300 000 spécimens auraient été abattus, un chiffre qui coïncide avec l'estimation de leur population avant l'ouverture de la chasse. Aujourd'hui, le nombre d'individus est estimé à 2 300 à travers l'hémisphère Sud.
Dans les mêmes eaux, les baleines à bosse ont connu un retour encore plus sensationnel, jusqu'à retrouver quasiment leurs populations d'avant la chasse. Les scientifiques entrevoient également un espoir pour les baleines franches australes. En revanche, l'histoire des baleines franches de l'Atlantique nord est plus sombre.
La plupart des pays se conforment à l'interdiction de la chasse à la baleine ordonnée par la Commission baleinière internationale, mais au début de l'année 2020, le Japon, la Norvège et l'Islande s'engageaient encore dans cette pratique. Néanmoins, début mai l'Islande nourrissait l'espoir des activistes de voir un jour cesser la chasse à la baleine dans le monde en annonçant que ses dernières compagnies baleinières allaient peut-être mettre fin à leurs activités.
6. L'OCÉAN SUR LE DEVANT DE LA SCÈNE
La semaine dernière, 14 nations ont dévoilé leur intention de gérer durablement 100 % de leurs eaux côtières d'ici 2025, ce qui équivaut à protéger une zone océanique de la taille de l'Afrique. Chaque pays a promis de lutter contre la surpêche, d'investir dans la réduction de la pollution et de classer 30 % de leurs nationales comme zones marines protégées d'ici 2030. Parmi ces pays figurent le Canada, le Mexique, le Japon, l'Australie, le Kenya, le Ghana, la Norvège et le Portugal. Ensemble, ces États représentent 40 % des côtes du monde entier.
Le territoire britannique d'outre-mer Tristan da Cunha est considéré comme l'une des îles habitées les plus reculées au monde. Cette année, le gouvernement britannique s'est engagé à protéger 670 000 km² d'océan autour de l'île.
Même s'il ne fait pas partie de cet accord, le Royaume-Uni a annoncé début novembre que le pays protégeait 7 millions de kilomètres carrés d'océans à travers le monde. Sa dernière zone marine protégée s'étend sur 670 000 km² autour du lointain territoire britannique Tristan da Cunha, un archipel de l'océan Atlantique Sud.
7. L'AVANT-GOÛT D'UN MONDE SANS POLLUTION
Appelez-le l'anthropause, c'est le nom donné par les scientifiques à l'arrêt mondial de l'activité humaine induit par l'émergence de la COVID-19 et l'immobilisation consécutive des populations. En mars, le voyage aérien avait chuté de 50 % par rapport à l'année précédente à la même période, le plus grand recul de l'histoire récente d'après l'Association internationale du transport aérien. Partout la circulation routière a également connu une diminution brutale. Dans certaines régions de l'Inde habituellement noyées sous la pollution, il était possible d'apercevoir la chaîne de l'Himalaya pour la première fois.
1er avril 2020 dans le centre de Los Angeles. Alors que les autorités implorent les résidents de rester chez eux pour limiter la propagation du virus, le trafic tristement célèbre qui congestionne habituellement la ville s'est miraculeusement envolé. L'activité à travers le monde a atteint un niveau si bas en 2020 que les scientifiques ont même enregistré une diminution de l'activité sismique.
« La nature reprend ses droits ! » s'est exclamé le monde.
Bien entendu, une pandémie mondiale dont le bilan se compte en millions de contaminés avec les conséquences que l'on connaît sur les moyens de subsistance n'est certainement pas la meilleure façon de rendre cette planète plus saine pour l'Homme, mais elle nous a permis de découvrir le monde qui était à notre portée au prix de quelques actions ambitieuses et décisives.
La pandémie a également offert aux scientifiques une opportunité inédite : la chance d'étudier les écosystèmes en l'absence de l'Homme, l'occasion rêvée de mesurer avec précision notre impact sur la nature. Même les océans sont devenus plus tranquilles et la vie aquatique a pu profiter de son environnement sans être dérangée par le bruit de notre activité.
Si vous voulez poursuivre sur cette lancée pleine d'espoir, découvrez les 10 découvertes scientifiques ainsi que les 10 victoires du monde animal que vous avez peut-être ratées cette année.
Craig Welch a contribué à la rédaction de cet article.
Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.