Le changement climatique augmenterait l'intensité des ouragans

Si la rareté des dégâts causés par Harvey et Irma est à souligner, cette saison des ouragans est moins anormale que l'on pourrait le penser.

De Michael Greshko
Publication 9 nov. 2017, 02:09 CET
Ouragan Harvey : une catastrophe naturelle d'une violence inouie

Alors que l'ouragan Harvey parachevait les dégâts causés à Houston, Irma a marché sur ses pas et est rapidement devenu l'ouragan le plus violent ayant jamais frappé l'océan Atlantique. Les comparaisons avec la saison des ouragans catastrophique de 2005, dernière fois que deux tempêtes d'une telle puissance ont menacé l'Atlantique, sont difficiles à éviter.

Comme en 2005, lorsque Katrina et Rita se sont succédé rapidement, dévastant sur leur passage la côte du golfe du Mexique, le monde assiste impuissant à la dévastation que les ouragans causent. 

 

COMMENT LES PRÉVISIONS ANNONÇAIENT-ELLE LA SAISON DES OURAGANS 2017 ?

Supérieure à la moyenne. Selon les estimations de l'agence américaine National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA), de l'université de l'État du Colorado et de la chaîne météo, les ouragans allaient être plus nombreux qu'à l'accoutumée dans l'océan Atlantique cette année. Le centre des prévisions climatiques de la NOAA annonçait 14 à 19 tempêtes et 5 à 9 ouragans cette saison.

À titre de comparaison, une saison des ouragans moyenne entre 1981 à 2010 comportait 12 tempêtes et six ouragans.

 

POURQUOI CETTE SAISON EST-ELLE SI VIOLENTE ?

Pour faire simple, les conditions atmosphériques étaient propices à la création d'ouragans et les eaux en surface de la mer étaient plus chaudes que d'habitude — ce point est un élément-clef. Selon les météorologues, plusieurs conditions, dont une forte mousson en Afrique de l'Ouest, étaient réunies pour faire de la mer des Caraïbes et d'une partie des régions tropicales de l'Atlantique — une zone de déclenchement des tempêtes appelée « principale région de développement » — un terrain propice aux ouragans.

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    Le 4 septembre 2017 à 17h24 (UTC), le satellite Suomi NPP exploité par la NOAA et la NASA a pris cette photo de l'ouragan Irma de catégorie 4 alors qu'il s'approchait des îles Sous-le-Vent.
    PHOTOGRAPHIE DE Noaa, NASA Goddard MODIS Rapid Response Team

    Pour Kerry Emanuel, scientifique spécialiste de l'atmosphère au Massachusetts Institute of Technology qui étudie les ouragans, deux facteurs se détachent. D'une part, la différence entre la vitesse des vents en surface et celle à environ 16 kilomètres de hauteur est très faible, ce qui permet à des ouragans de plusieurs kilomètres de hauteur de se former et de rester stables. D'autre part, la région tropicale de l'Atlantique présente un « potentiel thermique » élevé, qui implique l'évaporation rapide de l'eau dans l'atmosphère.

    « Le potentiel thermique est une limite de vitesse thermodynamique sur les ouragans », explique le scientifique. « Plus la vitesse maximale est élevée, plus les conditions sont favorables à la formation des ouragans et à leur puissance. »

    En outre, El Niño est au point mort cette année, ce qui favorise les ouragans de l'Atlantique. Lorsque le réchauffement de la région équatoriale du Pacifique est actif, le cisaillement du vent s'accroît et le potentiel thermique sur l'Atlantique diminue, nuisant ainsi à la survie des ouragans.

     

    UNE SAISON PLUS ACTIVE SIGNIFIE-T-ELLE QUE LES OURAGANS ATTEIGNANT LES CÔTES SERONT PLUS NOMBREUX ?

    Pas tout à fait. D'après les météorologues, il n'existe pas de corrélation tangible, en l'espace d'un an, entre le nombre de tempêtes au cours d'une saison d'ouragans et le nombre de tempêtes arrivant sur les côtes. Les conditions météorologiques locales tracent les chemins des ouragans jusqu'aux terres ; or, les météorologues ne peuvent les estimer que quelques jours avant.

    Néanmoins, l'atmosphériste signale que sur une échelle d'un siècle, il existe une corrélation entre le nombre d'ouragans et le nombre d'arrivées sur les côtes. Il souligne toutefois le caractère aléatoire d'une année à l'autre.

    « La tempête Andrew, survenue en 1992, était à l'époque l'ouragan le plus lourd de conséquences ayant jamais frappé les États-Unis. Pourtant, il est intervenu au cours de l'une des années les plus calmes de l'océan Atlantique », explique-t-il.

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        Des hommes couvrent les fenêtres de cartons pour les protéger du passage de l'ouragan Irma à San Juan, au Porto Rico, le 5 septembre dernier.
        PHOTOGRAPHIE DE Alvin Baez, Reuters

        LES PRÉVISIONS D'OURAGANS SAISONNIÈRES ONT-ELLES DONC VRAIMENT UN SENS ?

        Kerry Emanuel affirme que oui, mais elles sont plus utiles aux météorologues qu'aux populations. Il déplore que certaines personnes basent des décisions importantes, telles que la souscription à une assurance, sur des prévisions météorologiques qui prévoient des saisons « calmes ». Pourtant, même les saisons marquées par la rareté des ouragans peuvent apporter leur lot de tempêtes extrêmement destructrices, à l'image de l'ouragan Andrew en 1992. « Les prévisions météorologiques saisonnières sont si souvent mal interprétées qu'elles en deviennent contre-productives », confesse-t-il.

        Les prévisions annonçant l'arrivée sur les côtes d'un ouragan actif sont, quant à elles, d'une autre nature.

        « Les personnes se trouvant potentiellement sur le passage d'un ouragan doivent absolument être prudentes et suivre les indications des gestionnaires des mesures d'urgence », prévient Kerry Emanuel. « Si l'on vous dit de sortir, sortez, ne plaisantez pas avec cela. »

         

        QUEL RÔLE JOUE LE CHANGEMENT CLIMATIQUE DANS TOUT CELA ?

        Mesurer les effets du changement climatique sur l'activité des ouragans représente un défi. Les ouragans étant des phénomènes rares, les données nécessaires à l'examen d'une tendance par les scientifiques sont peu nombreuses.

        Ceci étant dit, les prévisions prenant en compte le réchauffement climatique indiquent que les cyclones tropicaux d'intensité moyenne — dont les ouragans de l'océan Atlantique — se feront probablement plus intenses au cours des décennies à venir. D'après Kerry Emanuel, il existe un « large consensus » quant à l'augmentation des ouragans de forte intensité (de catégorie 3, 4 ou 5) dans les prochaines décennies.

        On ignore toutefois si le nombre total d'ouragans augmentera ou diminuera. Plus de 70 % des cyclones tropicaux dans le monde sont des tempêtes de catégorie 1 ou 2 ; ces tornades plus faibles pourraient, ou non, se faire plus rares au cours des décennies à venir.

        Selon le scientifique et le rapport, les ouragans individuels engendreront en moyenne plus de précipitations à l'avenir, l'air plus chaud pouvant contenir davantage de vapeur d'eau. C'est probablement ce à quoi nous assistons d'ores et déjà aujourd'hui. Les scientifiques qu'a contactés la rédaction de National Geographic pour un reportage précédent sont unanimes : la hausse des températures due à l'activité humaine a très certainement joué un rôle dans les précipitations record engendrées par l'ouragan Harvey.

        D'après Kerry Emanuel, les futures vagues de tempêtes pourraient également empirer, notamment en raison de l'augmentation des ouragans intenses qui en sont la cause et de la hausse du niveau de la mer.

         

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