La Grande Barrière de corail aurait perdu la moitié de ses coraux en 25 ans
Selon une nouvelle étude, la Grande Barrière de corail aurait perdu près de la moitié de ses coraux au cours des 25 dernières années. Plus de 3 000 systèmes de récifs différents la composent, et la survie d'innombrables espèces en dépend.
Habitat d’une flore et d’une faune multicolores, la Grande Barrière de corail s’étire sur près de 2 300 km au nord-est de la côte australienne, le long de l’état du Queensland. Vue de haut, elle forme une frontière bleu turquoise au milieu d’une mer bleu marine.
« Quand j'ai commencé l'étude en 1995, je ne savais pas que le récif allait changer autant et si rapidement, aujourd’hui il est perturbé à jamais… » déplore le professeur Terry Hugues. En Australie, le réchauffement climatique bouleverse de façon sans doute irréversible le plus grand système corallien et la plus grande structure vivante de la planète : la Grande Barrière de corail.
Il y a quelques jours, le professeur Hugues et son équipe de l’ARC Centre of Excellence Coral Reef Studies ont publié une étude dans la revue scientifique Proceedings of the Royal Society dans laquelle 25 années de travaux ont été compilées. « Notre étude est la première à mesurer les changements de taille des coraux sur plusieurs décennies sur l'ensemble de la Grande Barrière de corail » explique le professeur Hugues, « elle montre qu'il y a moins de grandes, moyennes et petites colonies dans les eaux plus ou moins profondes chez pratiquement toutes les espèces de coraux » poursuit-il.
Inscrite depuis 1981 au patrimoine mondial de l’Unesco, elle abrite une faune marine d’une diversité exceptionnelle : 3 000 systèmes de récifs différents, 600 îles tropicales et 300 bancs de coraux. Elle permet la coexistence d’une multitude de plantes et animaux marins dont des raies, des requins, des tortues de mer, des algues…
Aujourd’hui, cette structure vivante est confrontée à sa cinquième vague de blanchissement massif. À l’origine de ce blanchissement, des changements de la température de l’eau qui entraînent l’expulsion des zooxanthelles symbiotiques, des algues unicellulaires qui utilisent les déchets métaboliques des coraux pour la photosynthèse.
Les coraux leur offrent abris, support et une bonne exposition lumineuse en échange de quoi ils bénéficient de l’oxygène que les zooxanthelles relâchent. Ce blanchissement ne signifie pas que le corail se meurt, mais il devient tout de même plus vulnérable au moindre stress, donc plus fragile.
« Si les températures mondiales augmentent de 3 ou 4°C, le récif sera méconnaissable, il n'y a donc pas de temps à perdre » insiste le chercheur. De fait, les récifs coralliens soutiennent les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire de centaines de millions de personnes à travers les tropiques, et génère près de 4 milliards de dollars de revenus annuel pour le secteur touristique australien.
En 2013, le WWF lançait son grand programme « se battre pour le récif » grâce auquel de petites victoires ont pu être obtenues : interdiction de tout dépôt de boues de dragage dans les eaux du site, annulation des constructions de nouveaux ports dans des zones encore intactes de la côte récifale. Des équipes continuent sur place de préserver cet écosystème unique.
« Nous devons absolument protéger les gros massifs de coraux, ce sont eux qui donnent naissance aux petits massifs, et ces nouveaux massifs sont très importants dans la continuité des espèces » précise Terry Hugues.
De manière générale, si les hausses de températures persistent, il faudra se résigner à voir la Grande Barrière de corail disparaître peu à peu. « Le seul et unique moyen efficace d'améliorer la condition des récifs coralliens est une action mondiale contre les gaz à effet de serre » conclut Hugues.