Sylvothérapie : quand un sceptique s'essaie aux "bains de forêt"
On dit que la pratique japonaise du bien-être génère de nombreux avantages pour la santé. Est-ce que ça marche ?
Photographie prise au parc national d'Acadia, une réserve de 19 000 hectares située sur la côte atlantique des États-Unis, principalement sur l'île des Monts Déserts du Maine.
La pratique japonaise du shinrin-yoku consiste à s'imprégner de la nature avec tous vos sens. Quand la randonnée consiste généralement à atteindre une destination et qu'une promenade dans la nature a pour but de jeter un regard curieux sur les plantes et les animaux, la thérapie forestière encourage les participants à s'engager lentement et délibérément avec la nature, dans une approche naturopathique.
Les séances guidées de sylvothérapie ou bain de forêt comprennent généralement des exercices de respiration profonde, des méditations et des invitations à partager ce que vous avez remarqué.
Cette approche consciente de la nature présente des avantages non-négligeables pour la santé. Des études menées au Japon et en Italie ont montré que les bains de forêt faisaient baisser la pression artérielle, la fréquence cardiaque et les concentrations de cortisol, l'hormone du stress. Ils ont aussi pour effet d'allonger la durée du sommeil et d'augmenter le nombre de lymphocytes cytotoxiques naturels, aussi appelés cellules tueuses naturelles, un type de globule blanc qui combat les cellules infectées ou tumorales.
Il existe des théories expliquant les effets de la sylvothérapie, mais la science ne les a pas encore prouvées.
SÉANCE GUIDÉE
En attendant, la pratique continue de se répandre. Introduite au Japon dans les années 1980, c'est maintenant une coutume courante là-bas, le gouvernement nippon ayant certifié plus de 1700 guides à ce jour. En 2012, le guide Amos Clifford a fondé l'Association californienne de thérapie de la nature et de la forêt, qui certifie des programmes et forme des guides.
J'ai appelé Clifford pour lui demander comment il avait découvert les bains de forêt et pourquoi j'aurais besoin d'un guide pour aller me promener. Il m'a expliqué qu'il est possible de tout faire par soi-même, mais qu'un guide vous permet de ralentir et d'approfondir cette discipline. Plusieurs centres de villégiature proposent des bains de forêt, y compris le Lodge at Woodloch, l'un des premiers complexes aux États-Unis à avoir passé la certification de Clifford.
Décidant d'ignorer mon cynisme, j’essaie de l’aborder avec un esprit ouvert et de me rendre au lodge, à Poconos en Pennsylvanie.
PLONGÉE DANS LA FORÊT
Je frotte des aiguilles de pin entre mon pouce et mon index. « Il faut vraiment entrer dedans », dit Josh Heath, saisissant une poignée d'aiguilles, les écrasant entre ses paumes d'ours et inspirant profondément. Je suis son exemple et fais rouler les aiguilles d'épinette rouge entre mes mains, amène mes paumes vers mon visage et respire l'odeur enivrante.
Josh Heath me montre ensuite comment marcher comme un renard, en plaçant mon pied en demi-cercle pour que je frappe le sol avec mon talon, puis mon gros orteil, suivi de mon petit orteil. Nous avançons sur le chemin et il me demande de prêter attention à ce qui bouge. Je me sens plus comme Elmer Fudd que comme un renard à l'affût, et je dois calmer mon monologue intérieur empreint de scepticisme pour me concentrer sur mon environnement. Quand je le fais, je remarque les fougères s'inclinant, caressées par le vent. Je repère un tamia qui traverse le chemin. À l'approche du lac, j'aperçois une demoiselle non loin du quai
Au moment où nous atteignons le quai, je me rends compte qu'avoir quelque chose de spécifique à rechercher m'aide à me concentrer et à rester dans le moment présent.
MARCHER DANS LA NATURE
Heath, qui est un ancien garde forestier, admet qu'il ne pensait pas à faire des bains de forêt au début. Mais il s'est rendu compte que chaque fois que quelque chose le rongeait, il allait pêcher ou se promener dans les bois. Il a constaté que les bains de forêt encourageaient davantage la pleine conscience. Heath dirigeait auparavant un programme de renforcement des compétences pour collégiens et me fait remarquer que les enfants passent leur temps à demander « pourquoi ? ». Les adultes ne le font pas aussi facilement, mais la nature nous encourage à le faire, même subtilement.
Je me demande s'il se rend compte qu'il touche à une idée connue sous le nom de théorie de la restauration de l'attention, qui est l'un des arguments expliquant pourquoi la nature a ce pouvoir guérisseur. Dans sa plus simple expression, la théorie dit que nos environnements urbains nous épuisent car ils nous stimulent à un niveau qui requiert une attention constante et dirigée (réponse aux e-mails, panneaux publicitaires, conduite en heures de pointe, etc.). La nature, elle, attire notre attention d'une manière beaucoup plus simple, ce qui nous permet en quelque sorte de nous « réinitialiser ».
La nuit suivante, j'essaye de me baigner seul dans la forêt. Je redescends vers le lac bordé d'arbres, je lève les yeux et vois tout l'éclat d'un ciel étoilé dénué de lumière artificielle. Je m'allonge sur le quai, écoute le vent et les vagues. J'entrevois une étoile filante disparaître derrière les arbres. C'est une démonstration naturelle étonnante - et je comprends parfaitement la nécessité de l'absorber.
Kelly DiNardo est l'auteur de plusieurs livres, dont le plus récent Living the Sutras: A Guide to Yoga Wisdom Beyond the Mat. Retrouvez-la sur Instagram.
Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.