Pourquoi les déchets recyclables ne sont-ils pas toujours recyclés ?

Un Américain produit en moyenne 2 kg de déchets par jour, un Français 1,4 kg. Voici comment éviter que de telles quantités ne finissent dans des décharges.

De Sarah Gibbens
Publication 23 janv. 2023, 18:56 CET
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Une usine de recyclage à San Francisco, en Californie. Le carton et le papier font partie des matériaux les plus simples à recycler contrairement au plastique dont le recyclage constitue, encore aujourd’hui, un défi de taille. 

PHOTOGRAPHIE DE Randy Olson, Nat Geo Image Collection

Un sac en plastique, une boîte à pizza usagée, des couverts en plastique, des serviettes en papier et une canette de soda : un seul repas à emporter ressemble un peu à un jeu de questions-réponses sur le recyclage.

Quels objets peuvent être recyclés ? Quels types de plastiques doivent aller dans les ordures ménagères ? Que se passe-t-il si l’emballage est gras ?

Recycler peut s’avérer compliqué d’autant plus que les règlements concernant cette pratique varient d’une commune à l’autre. C’est peut-être l’une des raisons pour lesquelles seulement 32 % des déchets sont recyclés aux États-Unis.

D’après un rapport de Greenpeace, seuls 6 % des déchets plastiques (allant de bouteilles aux poches de perfusions) produits aux États-Unis en 2021 étaient recyclés. Du fait de leur conception, certains éléments en plastique sont très difficiles à recycler et les usines de recyclage peinent à trouver de potentiels acheteurs pour ces matériaux.

Cette situation est problématique pour l’environnement et la santé : tout ce plastique se décompose en pièces microscopiques et contamine absolument tout ce qui l’entoure, de l’océan à nos corps

Les choses s’améliorent en termes de déchets papier car 68 % d’entre eux sont recyclés. Les experts soutiennent cependant qu’il reste des choses à faire pour améliorer le recyclage au sein des foyers et des communautés, notamment grâce au vote.

 

QUELS TYPES DE PLASTIQUES PEUT-ON RECYCLER ?

Vous souhaitez mieux trier vos déchets ? Ne vous laissez pas avoir par le triangle de flèches numéroté imprimé sur le plastique. Ces triangles ne signifient pas nécessairement que le produit est recyclable : il s’agit d’un code indiquant de quel type de « résine plastique » ce plastique est composé, parmi les sept types existants. Seules certaines de ces catégories sont actuellement recyclées.

« Le plastique est un véritable casse-tête », explique Darby Hoover, experte en recyclage au Natural Resources Defense Council (littéralement « conseil de défense des ressources naturelles ») des États-Unis. « Lorsque vous fabriquez un emballage en plastique ou un objet, vous lui ajoutez des colorants et des additifs pour changer ses propriétés comme sa rigidité ou sa flexibilité, en fonction de vos besoins. Et ces petits additifs affectent sa température de fusion et sa capacité à être recyclé. »

Le système de codage SPI d’identification des résines avait initialement pour but de faciliter le travail des usines de recyclage. Cependant, une étude de 2019 menée auprès de 2000 Américains a démontré que 68 % des participants considéraient ces symboles comme des preuves du caractère recyclable des matériaux. Ces symboles plastiques sont si souvent mal interprétés que l’État de Californie a récemment adopté une loi restreignant leur utilisation. 

Les experts soulignent l’importance de se renseigner sur les types de plastiques acceptés par les centres de tri locaux. Reste que de manière générale les plastiques portant les chiffres 1 et 2 sont les plus susceptibles d’être recyclés. Il s’agit de plastiques rigides comme ceux des bouteilles d’eau ou de lait et les centres de tri disposent de machines capables de nettoyer, déchiqueter et faire fondre ce type de plastique. 

Les plastiques de type 5, que l’on trouve dans certains types de récipients pharmaceutiques ou emballages alimentaires peuvent potentiellement être recyclés mais leur acceptation par les centres varie.

Les autres types de plastiques (3, 4, 6 et 7) ont plus de chance de finir dans une décharge que dans un bac de recyclage : les produits concernés sont le papier à bulles, les sacs en plastique et les emballages alimentaires souples.

« L’un des plus gros problèmes est le “ wish-cycling ”, ou le fait de jeter un déchet dans la poubelle de tri en espérant qu’il est recyclable », explique Hoover.

Une pure perte de temps, souligne-t-elle. Ce déchet finira au mieux dans une décharge, au pire, il brouillera l’équipement du centre de tri et devra être retiré à la main, ralentissant ainsi les opérations.

« Ces sacs en plastique s’enroulent autour des écrans donc il faut aller les découper. C’est un véritable fléau », explique Marti Matsch, directrice adjointe de Eco-Cycle, une usine de recyclage située à Denver, dans le Colorado.

Matsch explique que Eco-Cycle jette en moyenne près de 10 % des déchets récupérés car les habitants mettent au tri des objets qui ne peuvent être recyclés, comme des sacs en plastique ou des vêtements.

 

FAUT-IL NETTOYER NOS DÉCHETS AVANT DE LES METTRE AU TRI ?

Pour augmenter les chances que votre déchet soit recyclé pensez également à éviter que votre poubelle soit contaminée par de la nourriture, de la saleté ou des produits chimiques. 

Le papier, par exemple, est plus facile à recycler lorsqu’il est propre. Il pourrait ne jamais être recyclé s’il entre en contact avec la moindre trace de nourriture ou de moisissure d’autres déchets du bac de tri. C’est pour cette raison que les boîtes à pizza, souvent pleines de graisse, finissent avec les déchets ordinaires.

Les communes mettent généralement à disposition de leurs habitants un guide de recyclage. La ville de Paris indique par exemple sur son site internet comment trier ses déchets, les types de déchets acceptés ainsi que l’emplacement et les horaires d’ouverture des organismes de collecte. Aux États-Unis, la ville de Washington D.C. a mis en ligne une base de données des déchets recyclés par la ville et le Recycling Partnership, organisme qui cherche à améliorer le système de recyclage, propose une base de données nationale visant à aider les habitants à savoir quels déchets sont recyclés dans leur commune. 

 

OÙ VONT LES DÉCHETS UNE FOIS RECYCLÉS ?

Pour compenser le prix de la collecte des déchets, du tri et du recyclage, les communes peuvent vendre les matériaux recyclés, d'où la nécessité de trouver un acheteur pour ces matériaux. Néanmoins, la demande varie, c’est pourquoi certaines communes n’acceptent pas tous les types de déchets recyclables.

Le recyclage de l’aluminium est lucratif car ce métal peut être recyclé à l’infini sans se dégrader, à l’inverse du plastique par exemple, qui une fois recyclé donne un matériau de moins bonne qualité, employé dans la fabrication de tapis ou du bois composite.

Il existe un marché très intéressant pour le plastique de type 5 dans le Colorado, explique Matsch, c’est pourquoi Eco-Cycle accepte de recycler cette résine.

Cependant, les entreprises de recyclage ont généralement du mal à trouver des acheteurs pour leur plastique recyclé. Les mêmes additifs et colorants qui permettent de donner différentes formes, textures et couleurs au plastique, font qu’il est plus complexe de produire un matériau intéressant aux yeux des acheteurs.  

« C’est très difficile de trouver des acheteurs qui veulent donner une seconde vie au plastique recyclé car ils recherchent souvent une composition simple, et non un mélange complexe », explique Matsch.

Pendant des dizaines d’années, la Chine est restée le principal acheteur de plastique recyclé, important des millions de tonnes de plastique depuis les États-Unis. Elle a cependant augmenté ses standards en matière de plastique en 2017, laissant les usines de recyclage américaines sans acheteurs.

Une partie des matériaux recyclés a été expédiée vers d’autres contrées comme l’Indonésie ou le Mexique, ou s'est retrouvée dans des décharges.

Cependant, certaines sociétés, à l’image de l'entreprise Target ou Garnier par exemple, s’engagent de plus en plus à utiliser des matériaux recyclés.

 

COMMENT RENDRE LE RECYCLAGE PLUS EFFICACE ?

Les experts en politique environnementale affirment que l’une des solutions serait de mettre en place un système de consignes de bouteilles. C’est déjà le cas dans dix États américains, où l’on peut lire sur l’étiquette de certaines bouteilles un prix variant entre 0,05 et 0,15 $ (0.046 et 0.14 d'euros). En France, la consigne fait peu à peu son retour localement.

Les bouteilles en elles-mêmes se voient attribuer une valeur fixe grâce à ce système, ce qui incite les consommateurs à les déposer ensuite dans des consignes. Un rapport de 2020 indique que les États qui disposent de ces consignes produisaient deux fois moins de déchets classiques que les autres.

Des sites de dépôt sont également mis à disposition pour récupérer les sacs plastiques. Certains magasins disposent de sites de dépôt de sacs en plastique où les sacs ont plus de chances de rester propres et d'être acheminés vers des centres de recyclage spécialisés.  

« Il est également essentiel de se renseigner sur les politiques de tri mises en place et de soutenir les efforts en matière de réduction des déchets », explique Hoover. De nombreuses communes, à l'image de la ville de Strasbourg, définissent des objectifs « zéro déchets » qui nécessitent d’adopter davantage de stratégies de recyclage pour éviter de remplir les décharges.

Cependant, certains experts en environnement avancent qu’il va falloir innover et penser à autre chose que les bacs jaunes pour vraiment empêcher le flux de pollution plastique de se déverser dans l’environnement.

« La meilleure chose à faire dans l’intérêt des contribuables est de produire moins de déchets » explique Judith Enck, ancienne administratrice régionale et présidente de l’organisme de protection de l’environnement Beyond Plastics.

Ces dernières années, certains États américains ont adopté des lois qui rendent les producteurs responsables de la recyclabilité de leurs produits. Ces lois varient dans leurs approches. Certaines exigent que les fabricants contribuent à aider financièrement les usines de recyclage et d'autres qu’ils changent la conception de leurs produits de sortes qu’ils soient plus simples à recycler.

L'une des nouvelles approches du recyclage que Enck souhaiterait voir se développer sont l’utilisation de programmes permettant de laver et de remplir à nouveau les bouteilles et autres emballages. Elle donne l’exemple de la société de boissons Coca-Cola, qui, dans l’une de ses dernières annonces, s’est engagée à remplir ou réutiliser un quart de ses bouteilles en verre et en plastique d’ici à 2030, une initiative que les plus grands pollueurs plastiques devraient adopter selon elle. Enck mentionne également des actions à moindre échelle, comme ce que fait la start-up américaine Kadeya qui lave et remplit les bouteilles à l’aide d’un distributeur automatique.

« C’est le futur, affirme-t-elle, c’est ce dont nous avons besoin. »

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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