Le Cercle des neiges : l’histoire vraie qui a inspiré le film

L’équipe de rugby uruguayenne qui se trouvait dans un crash d’avion en 1972 a inspiré le film "Le Cercle des neiges". Un drame fait de résilience, de mort... et de cannibalisme.

De Parissa DJangi
Publication 16 janv. 2024, 14:35 CET
Les survivants uruguayens de l'accident d'avion survenu dans les Andes se blottissent dans le fuselage de ...

Les survivants uruguayens de l'accident d'avion survenu dans les Andes se blottissent dans le fuselage de l'épave, le 22 décembre 1972, peu après l'arrivée des sauveteurs. Pour survivre pendant soixante-douze jours dans cet environnement hostile, ils ont dû se nourrir de la chair de passagers décédés.

PHOTOGRAPHIE DE CSU Archives, Everett Collection, Bridgeman Images

Le 13 octobre 1972, le vol Fuerza Aérea Uruguaya 571, qui transportait quarante-cinq passagers, s'est écrasé dans les Andes. Au bout de soixante-douze jours, seules seize personnes avaient survécu.

Cet incident a inspiré plusieurs films, livres et séries télévisées, comme Les Survivants, en 1993, ou Yellowjackets, diffusée en France sur Canal+. Plus récemment, la série Le Cercle des neiges, une production Netflix, raconte les mois éprouvants passés au sommet de la montagne.

La véritable histoire du vol 571 est faite de vie, de mort, de désolation et de la résilience d’un groupe de personnes plongées dans des conditions extrêmes et devant faire tout leur possible pour survivre, y compris l'impensable.

 

LE CRASH DU VOL 571 DANS LES ANDES 

En cette journée d’octobre, le 571 était un vol affrété qui transportait des membres de l'équipe de rugby Old Christians Club, ainsi que des amis et des membres de leurs familles. Ils se rendaient à Santiago, au Chili, depuis Montevideo, en Uruguay, pour un match. Un seul passager n'avait aucun lien avec l'équipe.

Alors que l'avion approchait de sa destination, le copilote, le lieutenant-colonel Dante Lagurara, qui pilotait l'avion, a demandé à l'aéroport de Santiago l'autorisation d'atterrir. L'avion a alors commencé sa descente.

En 1972, le vol Fuerza Aérea Uruguaya 571 s'est écrasé sur un glacier isolé près de ...

En 1972, le vol Fuerza Aérea Uruguaya 571 s'est écrasé sur un glacier isolé près de la montagne d’El Sosneado, dans la province de Mendoza, en Argentine. Sur les quarante-cinq personnes à bord de l'avion, seulement seize ont survécu et affronté des conditions extrêmes allant du blizzard aux avalanches.

PHOTOGRAPHIE DE MARIANA SUAREZ, AFP, Getty Image

Malheureusement, Lagurara et le pilote, le colonel Julio César Ferradas, identifièrent mal la position de l'avion. Lorsque celui-ci traversa les nuages, il ne se posa pas sur la piste d'atterrissage de l'aéroport, mais s'écrasa dans une vallée située dans les montagnes.

Trente-trois survivants parvinrent à sortir de l'épave, s’aidant les uns les autres. Une épreuve encore plus grande leur fut ensuite imposée, celle de rester en vie dans les Andes gelées, où les températures descendaient en dessous de zéro et où des blizzards déversaient plusieurs mètres de neige. À haute altitude, l'air sec se raréfiait également de façon vertigineuse.

Les survivants, n’ayant accès ni à des fournitures médicales, ni au chauffage, ni à de la nourriture, utilisèrent l'épave de l'avion comme abri et se servirent de ses pièces, transformant les bagages en murs et les housses de sièges en couvertures. Puis les cadavres devinrent leur nourriture.

 

FAIRE L'IMPENSABLE POUR SURVIVRE

La petite quantité de nourriture trouvée dans l’avion par les survivants, comme des bonbons, du vin et de la confiture, ne dura pas longtemps.

Le froid extrême et la famine avaient déjà commencé à faire des victimes. Les corps s’empilaient les uns après les autres. En dix jours, six autres personnes étaient mortes et ceux qui survivaient s'affaiblissaient.

Ils prirent alors conscience d’un fait inévitable et radical : ils allaient devoir manger les morts pour vivre.

« Je n'oublierai jamais la première incision. Chaque homme était seul avec sa conscience au sommet de cette montagne infinie, par un jour plus froid et plus gris que tous ceux qui l'ont précédé ou suivi", a écrit le survivant Roberto Canessa dans ses mémoires de 2016, Tenía que sobrevivir (Je devais survivre). « Chacun de nous quatre, une lame de rasoir ou un morceau de verre à la main, avons soigneusement coupé les vêtements d'un corps dont nous ne pouvions pas supporter de regarder le visage. »

 

UNE AVALANCHE DÉVASTATRICE

La catastrophe survint dans l'après-midi du 29 octobre, un peu plus de deux semaines après l’accident. Alors que les rescapés se reposaient dans leur abri de fortune, une cascade de neige dévala le flanc de la montagne, ensevelissant l'avion et tuant huit autres personnes.

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    PHOTOGRAPHIE DE Bettmann, Getty Images

    « J'ai failli abandonner lorsque l'avalanche nous a frappés », a déclaré Canessa lors d'une interview accordée à National Geographic en 2016. « Mais l'un des gars m'a dit : "Roberto, tu as de la chance de pouvoir marcher pour nous tous". Ce fut comme une injection d’héroïsme dans mon cœur. Il avait les jambes cassées, mais je pouvais marcher. Ma mission n'était pas de penser à ce qui était le mieux pour moi, mais à ce qui était le mieux pour le groupe ».

    En décembre, les survivants n'étaient plus que 16 et furent confrontés à un choix : attendre la mort ou trouver de l'aide.

     

    SE SAUVER

    Un petit groupe fit le choix d’une mission de sauvetage. Canessa, Nando Parrado et Antonio Vizintín devaient escalader une montagne en espérant trouver de l'aide de l'autre côté. Ils passèrent des semaines à se préparer.

    Le 12 décembre, le trio prit la route. Trois jours après le début de l'expédition, Vizintín retourna au camp afin que Canessa et Parrado aient plus de chances d’aller au bout en comptant sur leurs rations limitées.

    Le 20 décembre, les deux hommes aperçurent un autre être humain, Sergio Catalán Martínez, un berger chilien. L'homme leur apporta de l’aide le lendemain et Parrado et Canessa conduisirent les autorités aux quatorze autres survivants.

    Après 72 jours perdus dans les Andes, tous étaient enfin sauvés.

     

    RETOUR À LA MAISON 

    La nouvelle de ce qu’on appelait alors le « miracle dans les Andes » a rapidement fait le tour du monde. L'exaltation suscitée par le sauvetage a rapidement cédé la place à l'horreur lorsque les survivants ont admis avoir mangé de la chair humaine pour survivre.

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    Des officiers de l'armée chilienne escortent le joueur de rugby uruguayen Fernando Parrado (au centre, sur la photo de gauche) après qu'il a été secouru par un autre survivant, Roberto Canessa, qui avait quitté le site de l'accident à pied pour aller chercher de l'aide. À droite, Carlos Paez, rescapé de l'accident, retrouve son père dans la joie. 

    PHOTOGRAPHIE DE Bettmann Archive, Getty Images

    Ils se défendirent : « on ne peut pas se sentir coupable d'avoir fait quelque chose que l’on n'a pas choisi de faire », a déclaré Canessa au Washington Post en 1978.

    Les survivants ont pourtant gardé le traumatisme du cannibalisme pendant les décennies qui ont suivi. « Pour nous, franchir ce pas a été une rupture définitive dont les conséquences ont été irréversibles. Nous n'avons plus jamais été les mêmes », explique Canessa dans ses mémoires.

    Bien que seize jeunes hommes aient pu descendre de la montagne, les restes de ceux qui n’avaient pas survécu n'ont jamais quitté les Andes et ont été enterrés près de l'endroit où ils sont morts.

    L'histoire du vol 571 aurait pu demeurer un sombre mystère, des récits qui tenteraient d’expliquer la disparition de toutes les personnes à bord de l'avion dans les Andes.

    Les survivants ont réécrit cette histoire en se sauvant eux-mêmes.

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      Gauche: Supérieur:

      Le vol 571 s'est écrasé dans la cordillère des Andes, à la frontière entre l'Argentine et le Chili. Ses rescapés ont été secourus grâce à des fermiers locaux. Sur cette image, des parents de passagers décédés se rendent à cheval sur le site.

      Droite: Fond:

      Les personnes décédées dans l'accident et dans les soixante-douze jours qui ont suivi ont été enterrées près de l'endroit où elles sont mortes. Ici, leur tombe est surplombée d’une croix.

      Photographies de MARIANA SUAREZ, AFP, Getty Images

      Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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