Les femmes sont-elles vraiment plus sensibles au froid ?

Avez-vous tendance à avoir très chaud ou êtes-vous constamment gelé(e) ? Découvrez ce que la science dit sur ce phénomène et ce que ça signifie pour votre santé et votre productivité.

De Carrie Arnold
Publication 16 juil. 2024, 13:54 CEST

Cette photographie thermique montre que la main de la femme est plus froide que celle de l'homme. Des études suggèrent que les femmes sont plus sensibles au froid que les hommes, mais c'est plus une histoire de composition corporelle que de genre.

PHOTOGRAPHIE DE Tyrone Turner, Nat Geo Image Collection

Même quand les températures à l'extérieur ne cessent d'augmenter, de nombreux employés de bureau ne se séparent pas de leur pull ou manches longues. Plutôt que des shorts et des sandales, le froid excessif à l'intérieur des lieux de travail est synonyme de chauffages d'appoint et de chaussettes moelleuses. Si le phénomène a donné lieu à un nombre infini de vidéos TikTok amusantes, le sujet est moins léger qu'il n'y paraît.

« Si les gens ne sont pas à l'aise, ils ne vont pas travailler au maximum de leurs capacités », explique Thomas Chang, économiste d'entreprise à l'université de Californie du Sud. « Cela semble évident au point de paraître idiot, mais c'est le résultat de nos recherches. »

Les travaux de Thomas Chang et d'autres chercheurs ont montré que les femmes ont tendance à se sentir plus à l'aise lorsque la température est plus chaude, contrairement aux hommes. Et ce n'est pas seulement dans les bureaux. Que ce soit à l'extérieur ou à l'intérieur, à la maison ou au travail, des études ont démontré que les femmes sont plus sensibles au froid.

Selon Thomas Chang, cela peut s'expliquer en partie par les différences de tenues vestimentaires. Si vous devez porter un costume trois pièces avec cravate sur votre lieu de travail, vous aurez plus chaud que si vous portez une robe d'été et des sandales. L'autre raison, c'est que les femmes brûlent en moyenne moins de calories au repos que les hommes, ce qui crée moins de chaleur interne.

Toutefois, ce n'est peut-être pas si simple. Une étude publiée en avril 2024 dans les Proceedings of the National Academy of Sciences a révélé que la taille et la composition d'une personne étaient plus importantes que son genre pour déterminer le moment où elle commence à avoir froid. 

 

COMMENT VOTRE TAUX MÉTABOLIQUE DÉTERMINE VOTRE TEMPÉRATURE CORPORELLE

Comme d'autres animaux à sang chaud, l'Homme dépense beaucoup d'énergie et d'efforts pour maintenir sa température corporelle à un niveau convenable. De nombreuses espèces modifient leur comportement pour s'adapter aux températures extrêmes, par exemple en devenant nocturnes pour faire face à la chaleur du désert ou en se dotant d'une épaisse fourrure pour survivr à un hiver glacial.

Mais tout comme les êtres humains varient en taille et en forme, nous varions également dans notre estimation de la température idéale. Certaines personnes se sentent à l'aise en short et en sandales même en hiver, alors que d'autres ont invariablement froid sans chapeau ni pull. Nos préférences en matière de température extérieure sont directement liées à l'intensité de notre métabolisme.

Les personnes ayant une masse musculaire plus importante et un corps plus large ont tendance à brûler plus de calories au repos que les personnes plus petites. Et si la graisse est isolante, elle peut également empêcher la chaleur générée d'atteindre les extrémités du corps.

En conséquence, les préférences en matière de températures peuvent être quelque peu sexuées, explique Boris Kingma, chercheur en performance thermique humaine à l'Institut néerlandais de technologie appliquée. Mais il précise que ce n'est pas aussi simple que « les femmes préfèrent les environnements plus chauds ».

D'une part, il souligne l'énorme chevauchement des températures idéales entre les hommes et les femmes. Les différences qui existent sont assez subtiles, selon Kingma. D'autre part, notre température préférée varie en fonction de notre niveau d'activité et de nos vêtements. Pour Kinga, le genre de ces variables fait une plus grande différence que le métabolisme.

Les données de la récente étude PNAS confirment ces résultats. Une équipe de scientifiques des National Institutes of Health a constaté que l'interaction entre le taux métabolique, la surface corporelle et le pourcentage de graisse corporelle était déterminante pour l'estimation de la température idéale d'une personne.

« Si vous avez un taux métabolique similaire, peu importe que vous soyez un homme, une femme, une personne âgée ou autre. Vous préférerez le même environnement », explique Boris Kingma.

 

COMMENT LA TEMPÉRATURE AFFECTE VOTRE CORPS

L'intérêt de Thomas Chang pour la relation entre la température et la productivité des travailleurs a commencé lorsqu'il a commencé à travailler dans un bureau où il faisait trop chaud. Il a opté pour autant de changements que possible, manches courtes plutôt que longues, café glacé plutôt que chaud, mais rien n'a changé le fait qu'il avait trop chaud pour se concentrer sur son travail. Au bureau, Chang ne pensait qu'à des moyens de se rafraîchir.

Cela n'est pas surprenant, estime Boris Kingma, car le fait de devoir générer ou dissiper un excès de chaleur corporelle est physiquement stressant. Lorsque vous avez trop chaud, les vaisseaux sanguins des extrémités de votre corps se dilatent pour lui permettre de libérer plus de chaleur. Si cela ne suffit pas, on commence à transpirer. A contrario, l'exposition au froid fait se contracter les vaisseaux sanguins des mains et des pieds pour empêcher la perte de chaleur. Si la température corporelle descend trop bas, les frissons peuvent aider à produire la chaleur nécessaire. Les deux extrêmes nécessitent une production d'énergie supplémentaire, explique Kingma.

Si l'hypothermie et les gelures surviennent lors d'expositions excessives au froid, des affectations comme la maladie de Raynaud se manifestent dans des conditions moins extrêmes. La maladie de Raynaud se manifeste par des spasmes des petits vaisseaux sanguins des doigts et des orteils, qui donnent aux extrémités une teinte blanche ou bleue. Elle touche de manière disproportionnée les femmes et les personnes vivant dans des climats froids et est considérée comme une forme extrême de sensibilité au froid. Cette affectation est réversible en cas de réchauffement, mais elle peut être inconfortable.

Au fil du temps, l'Homme a mis au point des stratagèmes pour s'adapter à certains climats parmi les plus extrêmes de la planète. Le feu et les fourrures d'animaux pour se réchauffer au début de son histoire, jusqu'aux options de haute technologie telles que les tissus thermo-isolants et les vestes chauffantes alimentées par des piles, permettant aux humains de vivre presque n'importe où.

« La seule raison pour laquelle l'Homme a pu peupler la planète est sa capacité à s'adapter à l'environnement grâce à la technologie », estime Boris Kingma. Et cette technologie ne se limite pas à la climatisation, souligne-t-il.

Bon nombre de ces technologies ne sont pas destinées à maintenir les humains à la température « parfaite », mais plutôt à veiller à ce qu'ils ne se réchauffent pas ou ne se refroidissent pas dangereusement.

 

COMMENT LA TEMPÉRATURE AFFECTE VOTRE PRODUCTIVITÉ

Thomas Chang voulait savoir dans quelle mesure le stress lié au fait d'avoir trop chaud ou trop froid affecte la productivité. En collaboration avec Agna Kajackaite du WZB Berlin Social Science Center en Allemagne, ils ont mené un test sur un groupe d'étudiants allemands afin d'estimer leur capacité à travailler lorsqu'ils avaient trop chaud ou trop froid.

Ils ont constaté que les étudiantes obtenaient de meilleurs résultats dans les tâches verbales et mathématiques lorsque les températures étaient plus chaudes, mais les hommes obtenaient de meilleurs résultats lorsqu'il faisait plus frais. La différence était significative, bien qu'apparemment subtile, quelques points de pourcentage seulement. À première vue, ce n'est pas grand-chose, mais de nombreux managers aimeraient bien augmenter la productivité de leurs employés d'un tel pourcentage, affirme Thomas Chang.

« Tout ce que vous avez à faire, c'est de vous assurer que vos employés sont à l'aise. Cela semble aller de soi », explique-t-il.

Stefano Schiavon, architecte et ingénieur en environnement à l'université de Californie à Berkeley, n'est pas convaincu. Il a mené une méta-analyse des études portant sur la relation entre la productivité et la température, en compilant des données de trente-cinq études distinctes, dont celle de Thomas Chang. Lorsqu'il a examiné l'ensemble des données, il a constaté que ce n'était qu'aux températures extrêmes que la productivité diminuait de manière significative. Si quelqu'un a un peu chaud ou un peu froid, cela n'a pas vraiment d'incidence sur ses performances, d'après lui.

Mais en fin de compte, la solution semble être simple : il suffit de baisser l'air conditionné. Il s'agit d'une mesure d'économie de coûts et d'énergie qui devient de plus en plus importante à mesure que la combustion des énergies fossiles réchauffe la planète, explique Schiavon. Régler la climatisation intérieure et permettre aux travailleurs de personnaliser leur garde-robe et leur espace de travail pour qu'ils puissent travailler à leur aise contribuerait grandement à résoudre les deux problèmes, ajoute-t-il.

« Nous utilisons beaucoup d'énergie coûteuse pour rendre les gens malheureux », déclare Schiavon.

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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