Voici comment réagit votre cerveau quand vous arrêtez d’utiliser les réseaux sociaux

Entre déficits en dopamine et symptômes de sevrage, suivre une détox digitale est loin d’être aisé. Voici nos conseils pour la réussir.

De Vittoria Traverso
Publication 2 janv. 2025, 18:12 CET
En moyenne, un jeune adulte passe près de cinq heures par jour sur les réseaux sociaux. ...

En moyenne, un jeune adulte passe près de cinq heures par jour sur les réseaux sociaux. Selon les spécialistes, l’utilisation constante des réseaux sociaux peut nuire à la santé mentale, mais arrêter de les utiliser, même pendant de courtes périodes, peut contribuer à en inverser les effets.

PHOTOGRAPHIE DE Vincent Migeat, Agence VU, Redux

Vous trouvez que vous passez beaucoup trop de temps à scroller sur votre portable ? Un Français passe en moyenne 1h48 par jour sur les réseaux sociaux, tandis que les plus jeunes utilisateurs y passent entre trois et cinq heures.

Alors que les spécialistes mettent en garde contre la dépendance que créent les réseaux sociaux, de plus en plus de personnes cherchent à s’en libérer, comme en témoigne l’augmentation de 60 % des recherches Google concernant la « détox digitale » ces derniers mois.

Mais arrêter de consulter son feed fait-il vraiment la différence ? Oui, d’après les chercheurs. Et les bénéfices pour votre cerveau et votre bien-être pourraient vous surprendre.

 

LES EFFETS DES RÉSEAUX SOCIAUX SUR LE CERVEAU

Nous sommes nombreux à estimer que nous passons trop de temps à scroller sur les réseaux sociaux, une préoccupation mise en évidence par l’Oxford University Press, qui a sélectionné « brain rot » (pourrissement du cerveau) comme le mot de l’année 2024. Trouver la volonté de réduire notre utilisation des réseaux sociaux n’est cependant pas chose facile, car ces derniers influent sur le système de récompense de notre cerveau.

Selon Anna Lembke, spécialiste des addictions et autrice du livre Un monde sous dopamine : Retrouver l’équilibre à l’ère du plaisir instantané, nous pouvons développer une dépendance aux réseaux sociaux au même titre que les drogues. D’après nos connaissances sur les effets des drogues et de l’alcool sur le cerveau, nous sommes en mesure de déduire qu’un processus similaire se produit lorsque nous utilisons les réseaux sociaux, chaque like, commentaire ou vidéo de chat mignon déclenchant un pic de dopamine, l’hormone du bonheur.

Notre cerveau est cependant conçu pour maintenir la dopamine à un équilibre global, qu’Anna Lembke décrit comme un mécanisme de bascule. Le fait de scroller sans cesse sur son portable finit par perturber cet équilibre, ce qui pousse le cerveau à compenser en produisant moins de dopamine ou en ralentissant sa transmission. Avec le temps, cela peut provoquer un « déficit de dopamine », qui nous conduit à passer plus de temps sur Internet pour nous sentir à nouveau « normaux ».

Mettre « en pause » ce cycle de dopamine induit par les réseaux sociaux peut aider le cerveau à réinitialiser le circuit de la récompense, explique la spécialiste, ce qui nous permet de mettre fin aux genres de surconsommation compulsive qui conduit au « pourrissement du cerveau ».

Il n’existe pas de solution unique en matière de détox digitale, avertit Paige Coyne, coautrice d’une étude portant sur les impacts pour la santé d’une détox digitale de deux semaines chez trente-et-un jeunes adultes. « L’utilisation excessive des réseaux sociaux ne se traduit pas de la même manière d’une personne à l’autre », explique-t-elle, avant d’ajouter qu’il est essentiel d’avoir des objectifs réalistes en matière de réduction de notre consommation habituelle des réseaux sociaux. « Certaines personnes peuvent vouloir ne plus les utiliser du tout tandis que d’autres veulent réduire de moitié le temps passé dessus ».

Pour aider à réinitialiser le circuit de la récompense du cerveau, Anna Lembke conseille de ne pas utiliser les réseaux le plus longtemps possible (dans l’idéal, pendant au moins quatre semaines). Mais même de brèves périodes sans contribuent à améliorer la santé mentale. Une étude portant sur soixante-cinq filles âgées de dix à dix-neuf ans a démontré qu’en faisant une pause des réseaux sociaux pendant trois jours, elles avaient une meilleure estime d’elles-mêmes et plus de compassion envers elles, et qu’elles éprouvaient aussi moins de complexes physiques.

 

COMMENT GÉRER LE SEVRAGE DES RÉSEAUX SOCIAUX

Que vous décidiez d’arrêter d’utiliser les réseaux sociaux pendant quelques semaines ou de réduire le temps que vous passez dessus chaque jour, vous trouverez probablement que les premiers jours sont les plus difficiles à vivre, reconnaît Sarah Woodruff, coautrice de l’étude sur la détox digitale réalisée avec Paige Coyne.

Attendez-vous à ressentir des « symptômes de sevrage », tels que de l’anxiété et une forte envie de consulter vos réseaux, le temps que votre cerveau s’habitue à des niveaux de dopamine plus faibles. Mais surmonter ces émotions désagréables aide à la réinitialisation du circuit de récompense de notre cerveau et met fin à ce cycle d’envie et de consommation. L’envie d’utiliser les réseaux sociaux finira par passer et il sera plus facile d’aller au bout de la journée sans avoir besoin sans cesse d’un shoot de dopamine. « Au fil des jours, les participants trouvent que la détox est moins difficile que ce à quoi ils s’attendaient », souligne Sarah Woodruff. « Une fois lancés, la plupart des gens apprécient l’expérience ».

Au terme des deux semaines de détox, au cours desquelles l’utilisation des réseaux sociaux était limitée à 30 minutes par jour, la plupart des participants ont constaté des effets positifs sur leur santé mentale, comme une plus grande satisfaction de la vie, une réduction du stress et un sommeil de meilleure qualité par rapport à la période antérieure à l’étude.

L’expérience est plus facile si vous unissez vos forces avec un ou deux compagnons de détox. Dans le cadre de l’étude portant sur les adolescentes, Tomi-Ann Roberts, professeure de psychologie au Colorado College, a demandé aux participantes de prendre chaque jour des nouvelles les unes avec les autres via un groupe WhatsApp pour se soutenir. « Nous avons constaté que les filles se sentaient déconnectées et avaient peur de rater quelque chose », rapporte la professeure, « mais elles pouvaient partager leur ressenti avec les autres, et elles se sentaient donc moins seules ».

En plus de réinitialiser le circuit de récompense de notre cerveau, le fait de momentanément disparaître des réseaux sociaux peut nous aider à prendre conscience de notre relation avec ces derniers. « Nous pouvons utiliser ce temps pour prendre du recul et devenir plus conscients de ce que nous faisons [sur les réseaux sociaux] et si cela est positif ou non pour nous », indique Sarah Woodruff. « Cela permet de voir si l’on parvient à faire tout ce que l’on doit faire dans une journée ou si l’on passe à côté d’une interaction dans le monde réel à cause des réseaux ».

 

UNE UTILISATION RAISONNÉE DES RÉSEAUX SOCIAUX

Après une période de détox, il est essentiel de mettre en place certaines règles pour éviter de retomber dans une surutilisation impulsive, estime Anna Lembke. « Je conseille de créer des barrières physiques et mentales entre nous et les réseaux sociaux, comme le fait de ne pas avoir de portable dans la chambre ou de désactiver les notifications », indique-t-elle.

Remplacer les shoots de dopamine aux effets rapides par des types de gratification moins instantanée peut contribuer à maintenir le circuit de récompense du cerveau dans un état d’équilibre. « Les sources de dopamine saines nécessitent généralement un peu de travail en amont », explique Anna Lembke, comme jouer d’un instrument ou cuisiner. « Lorsque nous effectuons ces actions qui nécessitent notre attention, notre cerveau libèrera de la dopamine, mais avec un certain décalage pour maintenir l’équilibre ».

Pour finir, les spécialistes recommandent de faire des détox digitales plusieurs fois par an pour garder une utilisation raisonnée des réseaux sociaux. « Nous ne pouvons pas nous débarrasser complètement des réseaux sociaux », ajoute Sarah Woodruff, « mais en réduire leur utilisation de temps en temps nous aide à faire le point et à prendre conscience de la manière dont nous utilisons ces plateformes et des sentiments qu’elles provoquent en nous ».

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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