Comment soulager les nœuds musculaires ?
Les nœuds musculaires peuvent se développer à cause du stress, de l'anxiété mais aussi de carences en vitamines. Comment les traiter ?
Cette image thermique met en évidence une région du corps contenant des points gâchettes courants. On ignore la manière exacte dont se forment les nœuds musculaires, mais ils seraient la conséquence d’un étirement chronique ou d’une surcharge du muscle pouvant entraîner des changements chimiques susceptibles de provoquer une hypersensibilisation des récepteurs de la douleur.
Si le terme « point gâchette » ne vous est pas familier, il y a de fortes chances pour que vous ayez déjà ressenti une vive douleur après avoir touché ou massé l’un de ces points.
En termes simples, un point gâchette est un nodule discret et hyper irritable (un « nœud » comme on dit dans le langage courant) palpable dans une bande musculaire tendue et susceptible de produire une douleur à cet endroit précis ou dans une autre partie du corps. Récemment, des liens ont été établis entre les points gâchettes et diverses pathologies, dont le syndrome myofascial (un trouble chronique impliquant les muscles et le tissu conjonctif environnant), les céphalées de tension (en particulier chez les femmes), les migraines, les cervicalgies chroniques et les lombalgies.
Bien que le terme officiel de « point gâchette myofascial » ait été inventé dans les années 1950, la recherche sur les causes sous-jacentes de ce mal et les traitements efficaces contre celui-ci est relativement récente.
Il s’agit là d’une évolution positive, car les points gâchettes sont répandus : « 85 % de la population souffriront de douleurs myofasciales à un moment ou l’autre, et ces douleurs sont souvent liées à des points gâchettes », explique Shana Margolis, médecin spécialiste de la médecine physique et de la réadaptation à la Northwestern Medicine, dans la région de Chicago.
« Le syndrome myofascial est une sorte de grande boîte noire des douleurs chroniques », explique Kiran Rajneesh, neurologue et médecin spécialiste de la douleur au centre médical de l’université de l’Ohio, à Columbus. « Ce pourrait être plus qu’un problème musculaire. Il pourrait y avoir une histoire d’inflammation articulaire sous-jacente. »
DES MAUX DIFFICILES À DIAGNOSTIQUER
Les points gâchettes surviennent parfois à la suite d’une blessure, d’un traumatisme ou d’un effort répétitif ou peuvent résulter d’une mauvaise posture, comme lorsqu’on est recroquevillé derrière son écran, ou d’un exercice physique excessif. Dans tous les cas, un nodule musculaire (ou « nœud ») se forme. Les points gâchettes « apparaissent généralement lorsqu’un muscle est trop sollicité : il reste alors contracté et ses fibres restent [étroitement] nouées », explique Margolis.
Selon une nouvelle hypothèse, les points gâchettes se développeraient en raison d’une « défaillance des mécanismes de régulation et de défense […] qui empêchent une activité musculaire excessive ou qui préviennent une accumulation potentiellement néfaste [d’ions calcium] dans les cellules musculaires », selon un article publié l’année dernière dans la revue International Journal of Molecular Science.
« Nous ne savons pas exactement comment se forment les points gâchettes, mais ils pourraient être liés à un étirement chronique ou à une surcharge du muscle », explique Jennifer Hankenson, spécialiste de la médecine physique et de la réadaptation à la faculté de médecine de Yale. « Cette tension chronique entraîne des changements chimiques dans le muscle soupçonnés de provoquer une hypersensibilisation des récepteurs de la douleur. La douleur associée aux points gâchettes est souvent disproportionnée par rapport à la blessure sous-jacente, en raison du processus de sensibilisation à la douleur. »
Dans certains cas, la douleur peut être associée à un dysfonctionnement musculaire, à une tension ou à une faiblesse musculaire, à une perte de souplesse et à une perte d’amplitude des mouvements.
Comme les points gâchettes ne sont pas une pathologie à proprement parler, aucun test sanguin, aucune technique d’imagerie, ni aucun outil diagnostique ne permet de les identifier avec certitude. La technique la plus couramment utilisée reste donc la palpation. Ainsi, si un clinicien exerce une pression sur une zone du corps et que le patient dit ressentir de la douleur ou montre des signes de douleur (s’il grimace ou gémit) ou si la pression exercée entraîne un spasme en réponse à la douleur, c’est probablement le signe qu’un point gâchette se trouve à cet endroit.
POINTS GÂCHETTES (ACTIFS ET PASSIFS) VS POINTS SENSIBLES
Les douleurs corporelles peuvent résulter de différents types de points gâchettes. En effet, un point gâchette dit actif est douloureux sans qu’il soit nécessaire de le toucher, tandis qu’un point gâchette dit latent (ou passif) n’est douloureux que lorsqu’une pression lui est directement appliquée dessus, explique Kemly Philip, médecin en médecine physique et réadaptation à l’université du Texas Health Science Center à Houston et à l’hôpital TIRR Memorial Hermann. « Une pression directe sur un point gâchette actif peut même stimuler une réponse autonome comme de la transpiration, des rougeurs ou une sensation d’étourdissement. » Ces deux types de points peuvent provoquer une douleur référée, soit une douleur qui irradie à partir du point gâchette.
En outre, on parle de points gâchettes satellites lorsque la douleur s’étend sur une zone considérable, comme de l’épaule au coude ou du dos aux fesses par exemple, ajoute Margolis. « Les points gâchettes satellites disparaissent généralement lorsque le point gâchette primaire se résorbe », explique Philip.
Des recherches ont également montré que le stress et l’anxiété pouvaient jouer un rôle dans le développement des points gâchettes musculaires et que ces derniers pouvaient également être le fait de carences en vitamines (telles qu'en vitamine B12) et en minéraux (comme le zinc et le magnésium).
Il convient par ailleurs de faire la distinction entre les points gâchettes et les points sensibles, ces zones de sensibilité dans un muscle ou autour (mais pas dans) des articulations, caractéristiques de la fibromyalgie, une maladie chronique complexe qui provoque des douleurs et une sensibilité dans tout le corps. Parmi les principales différences, citons le fait que les points gâchettes ont tendance à provoquer un spasme ou un tressaillement dès lors qu'on les touche (contrairement aux points sensibles) et qu’ils peuvent se former dans n'importe quel muscle, tandis que les points sensibles ne se trouvent qu'à dix-huit endroits spécifiques et symétriques du corps. Enfin, les points gâchettes peuvent provoquer une douleur référée, ce qui n’est pas le cas des points sensibles.
« Différencier les points gâchettes des points sensibles est crucial, car cela oriente nos choix de tests et de traitements dès le début », explique Rajneesh. La présence de points sensibles implique de réaliser des analyses sanguines pour rechercher des affections auto-immunes, dont les traitements sont différents de ceux des points gâchettes, ajoute-t-il. Reste que le débat sur le caractère auto-immun de la fibromyalgie n’est toujours pas tranché par les experts.
QUELS TRAITEMENTS ?
Diverses interventions peuvent aider à soulager la douleur liée aux points gâchettes, mais trouver la bonne se fait généralement à tâtons. Parmi les techniques d’atténuation de la douleur les plus accessibles, citons l’application de chaleur ou de glace (selon la sensation ressentie) ou d’une crème analgésique topique, et l’utilisation d’anti-inflammatoires non stéroïdiens en vente libre (comme l’ibuprofène et le naproxène), note Philip. L’automassage, à l’aide d’un pistolet de massage, d’une balle de tennis ou d’un rouleau en mousse sur la zone affectée peut aussi s’avérer utile.
Il est également essentiel de corriger votre posture, votre biomécanique (lorsque vous marchez ou soulevez des objets, par exemple) et votre ergonomie au travail, explique Margolis. « Nous avons tendance à vivre dans un monde où la tête et les épaules sont dirigées vers l’avant », explique-t-elle. « Il faut s’efforcer de corriger cela. »
Il est par ailleurs judicieux de prêter attention à ses habitudes de vie. « Si vous dormez bien, si vous vous hydratez et si vous consommez des micronutriments [tels que le calcium, le magnésium, le zinc et le cuivre] qui sont anti-inflammatoires, vous guérirez plus vite et vous réduirez les spasmes musculaires », explique Rajneesh.
Si ces mesures ne vous soulagent pas suffisamment au bout de deux semaines, consultez votre prestataire de soins de santé pour des soins plus poussés. Il peut s’agir de kinésithérapie, de thérapies manuelles (comme la technique du « spray and stretch » », qui consiste à pulvériser un liquide réfrigérant sur la zone douloureuse pour l’insensibiliser avant d’étirer doucement le muscle pour améliorer l’amplitude des mouvements) et de stimulations électriques. Les ultrasons, qui « procurent une chaleur profonde pour augmenter le flux sanguin dans la zone afin de détendre le muscle », peuvent également s’avérer utiles, souligne Margolis.
Plus radicales encore, « les injections de stéroïdes et/ou d’anesthésiques locaux [comme la lidocaïne] peuvent relâcher les points gâchettes », ajoute Rajneesh.
En outre, des études récentes ont montré que divers traitements physiques, tels que les massages, l’acupuncture, l’électroacupuncture et le dry needling pouvaient aider à soulager diverses formes de douleur associées aux points gâchettes.
L’objectif de chacun de ces traitements est de libérer d’une manière ou d’une autre le point gâchette afin que la bande musculaire sous tension se détende et que la douleur se dissipe.
Rajneesh mentionne également une thérapie plus récente, les injections de plasma riche en plaquettes (PRP), qui consiste à injecter les propres plaquettes d’une personne dans la région douloureuse pour stimuler la guérison et le remodelage des tissus. L’inconvénient étant qu’il s’agit « d’une méthode coûteuse et considérée comme expérimentale par les compagnies d’assurance », ajoute-t-il, ce qui implique qu'elle ne sera probablement aucunement remboursée.
Quel que soit le traitement, les points gâchettes peuvent être dénoués. Malheureusement, ils peuvent être amenés à réapparaître. Si tel est le cas, vous pouvez toujours opter pour d'autres interventions thérapeutiques. « Un spécialiste de la réadaptation physique ou un algologue [spécialiste de la douleur] saura probablement vous aider à choisir le meilleur traitement pour soulager votre douleur et éviter sa réapparition », souligne Hankenson.
Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.