Les compléments alimentaires peuvent-ils vraiment aider à traverser la préménopause ?

Certaines pilules et crèmes prétendent soulager les bouffées de chaleur, la perte osseuse et d’autres symptômes liés à cette phase de transition vers la ménopause. Mais est-ce vraiment le cas ?

De Jani Hall
Publication 28 mars 2024, 15:27 CET
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Les changements des niveaux d’hormones lors de la périménopause peuvent provoquer divers symptômes comme des bouffées de chaleur et de l’irritabilité. De nombreux compléments alimentaires prétendent soulager ces symptômes : sont-ils réellement efficaces ?

PHOTOGRAPHIE DE luciano de polo stokkete, Alamy Stock Photo

La préménopause (ou périménopause) a le vent en poupe sur le marché des produits non médicamenteux : outre les traitements traditionnels de la ménopause, on trouve de plus en plus de pilules et de crèmes en vente libre destinées aux femmes sur le point d'atteindre la ménopause.

La préménopause, cette période précédant la ménopause, se manifeste généralement vers 45 ans et dure souvent plusieurs années. Au cours de cette phase de transition, les changements hormonaux peuvent entraîner une perte osseuse et provoquer des dizaines de symptômes désagréables tels que des bouffées de chaleur, des troubles du sommeil et des troubles de l’humeur.

Alors que l’hormonothérapie et d’autres médicaments sur ordonnance peuvent aider à soulager certains de ces symptômes, de nombreuses personnes cherchent d'autres solutions. « C’est là que les compléments alimentaires et les produits non médicamenteux entrent en jeu », explique Mary Jane Minkin, gynécologue et professeure clinique à l’école de médecine de Yale.

Mais selon Minkin et d’autres médecins habitués à traiter les symptômes de la préménopause, les données scientifiques relatives à de nombreux produits portent à confusion. « Mieux vaut considérer la plupart de ces produits avec des pincettes », soutient Nanette Santoro, professeure et présidente du département d’obstétrique et de gynécologie à la faculté de médecine de l’université du Colorado.

Voici ce que l’on sait des compléments alimentaires censés soulager les symptômes de la préménopause, et ce que suggèrent les experts à ce propos.

 

QU’EST-CE QUE LA PRÉMÉNOPAUSE ET QUE CONTIENNENT CES COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES ?

Pendant la préménopause, les ovaires produisent moins d’œstrogènes et de progestérone (les hormones sexuelles féminines) et leurs taux augmentent et diminuent de façon sporadique, ce qui entraîne des règles irrégulières. La ménopause, quant à elle, se définit par l’absence de règles de plus d'un an.

Bien que les termes « préménopause » et « ménopause » fassent référence à deux étapes distinctes du développement humain, ils sont souvent utilisés l'un pour l'autre, et ce même sur l’emballage de certains compléments alimentaires, souligne Santoro.

Les produits qui prétendent soulager les symptômes de la préménopause sont souvent constitués d’un mélange de divers ingrédients, dont de la vitamine B (pour l’énergie, l’humeur, etc.), de la vitamine D (pour la santé des os) et des minéraux comme le zinc (pour la santé de la peau et des ongles).

Certains contiennent également des plantes comme la maca et la populaire actée à grappes noires, toutes deux censées atténuer plusieurs symptômes, ainsi que des phytoestrogènes, des composés provenant de plantes telles que le soja et le trèfle rouge, qui présentent une structure et des fonctions similaires à l’œstrogène humain.

 

CES COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES SONT-ILS EFFICACES ?

Selon les experts, il n’y a tout simplement pas assez de preuves pour affirmer que ces ingrédients soulagent bel et bien les effets secondaires de la préménopause. En effet, certains ingrédients n’ont été que peu étudiés, quand, pour d’autres, les résultats des études se sont souvent avérés incohérents.

Par exemple, des analyses de la littérature scientifique réalisées en 2012 et 2016 ont montré que l’ingestion d’extrait d’actée à grappes noires ne réduisait pas plus les bouffées de chaleur que la prise d’un placebo. Pourtant, une revue systématique de 2017 a soutenu le contraire.

Selon Minkin, les études sur les compléments alimentaires sont souvent loin d’appliquer la méthodologie de référence recommandée pour ce type de recherche, à savoir de vastes essais randomisés, en double aveugle, contrôlés par placebo, qui suivent les participants dans le temps.

Par ailleurs, la diversité des processus de culture, d’extraction et de production de nombreux ingrédients complique davantage la collecte de données fiables, ajoute Minkin.

Prenons l’exemple du soja, parfois commercialisé comme traitement des bouffées de chaleur. En 2023, la Menopause Society, une organisation à but non lucratif américaine, a conclu qu’il était difficile de résumer les études publiées sur le soja depuis 2015, tant elles étaient différentes. En effet, ces études analysent des dosages du soja différents ou des mélanges de soja et de différents minéraux et vitamines, ainsi que différentes formes d'aministration du soja, comme des boissons et des comprimés.

En fin de compte, la Menopause Society n’a recommandé ni le soja ni aucun autre complément alimentaire qu’elle a évalué (dont des capsules d’onagre, de la crème d’igname sauvage et autres) pour traiter les bouffées de chaleur.

Cela dit, les experts expliquent qu’il peut leur arriver de recommander certains compléments alimentaires aux personnes en période de préménopause. Les suppléments de calcium, par exemple, peuvent favoriser la santé des os si l’alimentation n’en fournit pas suffisamment, tout comme la vitamine D, que l’on produit moins efficacement avec l’âge, explique Karen Adams, professeure clinique d’obstétrique et de gynécologie à la faculté de médecine de l’université de Stanford.

En outre, Adams indique qu'il existe « quelques preuves » suggérant que la mélatonine peut améliorer le sommeil, en particulier chez les personnes âgées, mais ces études sont de petite envergure et de courte durée. Les experts ont également averti le National Geographic que la mélatonine ne devait être utilisée qu’à court terme.

Bien sûr, les preuves anecdotiques abondent, certaines personnes jurant que certains compléments alimentaires les ont aidées à soulager leurs symptômes. Cependant, selon les experts, il pourrait s’agir d’un effet placebo puisque dans le cas des traitements contre les bouffées de chaleur, par exemple, des études ont démontré que plus de 30 % des personnes signalaient des améliorations avec le placebo.

Quoi qu’il en soit, si les symptômes s’améliorent et si le complément alimentaire semble sans danger, Minkin préfère aller dans le sens de ses patients. « Ma ligne de conduite habituelle est la suivante : si mes patients trouvent une utilité aux suppléments, je les invite à poursuivre leur traitement », dit-elle.

Mais comment s’assurer qu’un complément alimentaire est sans danger ? C’est une autre histoire.

 

CE QU’IL FAUT SAVOIR AVANT DE PRENDRE DES COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES POUR LA PRÉMÉNOPAUSE

Les agences de régulation des médicaments n’ont pas à approuver la plupart des compléments alimentaires pour qu’ils soient commercialisés. Il n’y a donc aucune garantie qu’un produit soit efficace, qu’il n’interagisse pas avec des médicaments ou même qu’il contienne ce qu'indique l’étiquette. « Les fabricants de compléments alimentaires peuvent prétendre tout ce qu’ils veulent », déclare Adams.

Une étude de 2006, par exemple, a révélé que trois des onze produits à base d’actée à grappes noires analysés dans le cadre de l’étude ne contenaient pas d’actée à grappes noires, mais une autre plante à fleurs appelée actée asiatique.

Il est ainsi recommandé aux personnes qui envisagent d’acheter des compléments alimentaires pour la préménopause de rechercher le sceau de la pharmacopée française, de Consumerlab.com ou de NSF International, qui testent les compléments alimentaires pour vérifier des facteurs tels que l’identité des produits et leur pureté. 

 

LES AUTRES SOLUTIONS POUR SOULAGER LES SYMPTÔMES

Si de nombreux médecins ne vous orienteront pas vers les compléments alimentaires, vous pouvez trouver d’autres types de solutions fiables et approuvées.

Selon les experts, l'intervention hormonale constitue le traitement le plus efficace pour pallier les symptômes courants de la préménopause. En revanche, si certains médecins préfèreront l’hormonothérapie (soit le recours à des pilules, des patchs ou à tout autre produit contenant des œstrogènes ou un mélange d’œstrogènes et de progestérone), explique Minkin, d’autres ne vous la recommanderont pas, car la production d’œstrogènes chez les personnes préménopausées peut encore être élevée à certains moments. Une des solutions dans ces cas-là peut être d'avoir recours à une contraception hormonale.

Toutefois, si vous préférez renoncer au traitement hormonal ou si vous n’êtes pas une bonne candidate pour ce traitement (comme les personnes ayant des antécédents de thrombose idiopathique ou de cancer du sein ou d’autres cancers sensibles aux œstrogènes, par exemple), vous pouvez également vous procurer des médicaments non hormonaux sur ordonnance.

Certaines techniques psychocorporelles peuvent également s’avérer utiles.

Pour atténuer les bouffées de chaleur, la Menopause Society recommande deux techniques : l’hypnothérapie, qui implique des séances de relaxation profonde et axées sur la concentration destinées à vous rendre plus influençable, et la thérapie cognitivo-comportementale, axée sur l’identification et le remplacement des schémas de pensée néfastes.

Santoro rappelle que faire de l’exercice physique est « bon dans tous les cas », mais souligne également que selon certaines données, il n'aide pas à réduire les bouffées de chaleur. Par ailleurs, le fait de suivre un régime alimentaire équilibré, composé d’aliments entiers et non transformés, permet de contrôler la glycémie, d’assurer un apport adéquat en vitamines et de prévenir la prise de poids qui peut survenir pendant la préménopause, souligne Santoro.

Enfin, Minkin insite : il est essentiel de consulter un fournisseur de soins de santé bien informé qui peut vous aider à naviguer parmi les options, y compris les compléments alimentaires.

« J’encourage toujours mes patients à consulter des sources fiables, ajoute-t-elle, et à ne pas fonder leurs décisions sur les propos d’une star de cinéma. »

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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