Le tour du monde en neuf merveilles : l’Australie
Nos reporters ont embarqué pour une circumnavigation jalonnée de neuf prouesses architecturales ou naturelles. Quatrième étape : la Grande barrière de corail.
Habitat d’une flore et d’une faune multicolores, la Grande Barrière de corail s’étire sur près de 2 300 km au nord-est de la côte australienne, le long de l’état du Queensland. Vue de haut, elle forme une frontière bleu turquoise au milieu d’une mer bleu marine.
Tout autour de moi, le silence. Et cette impression de pénétrer un monde parallèle, ouaté et poétique, forêt fantastique de structures alvéolaires ou tentaculaires, en réalité coraux souples ou solides, dont certains âgés de plusieurs milliers d’années. Je dérive au-dessus de bénitiers géants, aux valves entrouvertes, et d’impressionnantes anémones de mer abritant en leur sein de minuscules poissons-clowns.
Pour résister au pouvoir urticant de ces cnidaires anthozoaires, le petit vertébré a trouvé la parade : il se frotte à elle et suit ses mouvements. Je me laisse encore portée quelques minutes par le courant. Puis, prise de claustrophobie, je sors la tête de l’eau. Ainsi se termine ma première séance de snorkeling. Avant de me lancer, j’avais hésité mille fois, mais Séverine, notre guide pour la journée, avait su me convaincre : « On ne nage pas tous les jours sur la Grande Barrière de corail. » D’autant que le récif – qui s’étend sur quelque 348 000 kilomètres carrés – est particulièrement menacé par le réchauffement climatique. Selon un rapport d’août 2019, un tiers de ses coraux auraient disparu après les vagues de chaleur de 2016 et 2017.
Sur le catamaran, du bleu marine à perte de vue, l’ambiance est à la détente. Après dix jours, de petits groupes se sont formés parmi les passagers de ce tour du monde Safrans du Monde. Des éclats de rire fusent. Discrètement, Françoise s’approche de moi : « J’ai vu que vous paniquiez tout à l’heure. Ça vous intéresse d’essayer mon masque ? Il est intégral et permet de respirer normalement. » Je suis touchée, mais décline la proposition, optant pour un tour en canot à fond de verre, à travers lequel j’entrevois de jolis poissons-perroquets bleus. « Ils broutent les algues et le corail en donnant comme des coups de bec, qu’on entend sous l’eau.C’est le fruit de leur digestion qui produit le sable blanc », m’explique Pete, le guide australien, passant en un instant de la poésie à la prose.
Mais déjà, il nous livre les secrets d’un autre habitant des lieux, à la robe jaune fluo : « Les poissons-papillons sont comme les inséparables, ils vivent à deux, un mâle et une femelle, quand l’un mange, l’autre monte la garde. Si l’un d’eux meurt, l’autre s’éteint peu après. » J’imaginais la Grande Barrière de corail multicolore, ici, elle apparaît plutôt dans un camaïeu de beige. « C’est signe de bonne santé, cela veut dire que les poissons la débarrassent correctement de ses algues », assure Pete.
Alors que nous regagnons le port, à une trentaine de kilomètres, nous apercevons au loin ce qui semble une chaîne de montagnes de roches grises, comme taillées au couteau. En réalité, vue de près, la cordillère se pare d’une couverture verte et moutonneuse. C’est la Great dividing range du Queensland qui abrite une luxuriante forêt pluviale. Difficile d’imaginer que quelques semaines plus tard, l’État australien sera frappé par des incendies dévastateurs, triste conséquence du réchauffement climatique.
Je finis la journée par une longue balade sur la plage de Port Douglas. La langue de sable crème, en forme de boomerang, est couverte d’algues dorées et de quelques noix de coco éparses, près desquelles s’ébrouent de drôles de petits oiseaux gris à longs becs effilés. L’une de ces plages où cocotiers et frangipaniers poussent inclinés la tête vers les flots, comme s’ils avaient été arrêtés net dans leur course vers le large, en réalité par phototropisme, afin de quérir un maximum de soleil.
Les habitants du coin y sont nombreux à courir ou promener leurs chiens. Au bout de trois quart d’heure, nous tombons sur une joyeuse bande de pêcheurs, joint de marijuana aux lèvres, dont Vincent, dreadlocks et chemisette colorée, qui vient ici tous les soirs, à marée haute, dans l’espoir d’attraper un barramundi, énorme poisson à chair blanche. Les amis sont équipés : quatre cannes à pêche et, surtout, une glacière remplie de bières et de glace pilée, le tout gentiment protégé par un trio d’étonnants gardes du corps, de vieux chiens bâtards, dont l’un proche de l’obésité.
La soirée se veut plus glamour. Alors que nous prenons l’apéritif au champagne dans le lobby de l’hôtel, Yann se met au piano et entonne « La Valse de l’adieu », de Chopin. Décidément, le chef de croisière, danseur et comédien de formation, a plus d’un talent. Je me laisse tenter par un amuse-bouche insolite : du kangourou aux graines germées. « Ici, c’est une viande peu onéreuse, car on en a beaucoup, me glisse Séverine. Mais, pour les Australiens, c’est un peu comme si on mangeait du rat, c’est plutôt pour les touristes. » Va pour l’expérience de touriste ! Bilan : un goût légèrement faisandé, déjà oublié.
À peine le temps de rendre visite aux koalas et aux kangourous du parc animalier Wildlife Habitat de Port Douglas et nous revoici avec l’équipage. Mais avant de quitter pour de bon l’Australie, le pilote nous fait un cadeau : un vol à 360°, à basse altitude, au-dessus de la Grande Barrière de corail, privilège négocié avec les autorités de l’aéroport.
Y ALLER
La prochaine croisière aérienne Tour du Monde de Safrans du Monde comptera neuf escales : la baie de Rio, le Machu Picchu, l’île de Pâques, la Polynésie française, la vibrante Sydney, la baie d’Along au Viêt Nam, les temples cambodgiens d’Angkor, le Taj Mahal en Inde et Pétra en Jordanie.
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