Ces animaux s'adaptent aux chaleurs les plus extrêmes

Des renards aux wombats, ces animaux se sont adaptés à la vie dans le désert. Cependant, pour leur survie, leur évolution devra s’accélérer au rythme du changement climatique.

De Christine Peterson
Publication 9 juin 2023, 13:18 CEST
Les dromadaires (Camelus dromedarius) du désert d'Arabie peuvent absorber l'eau contenue dans l'air humide grâce à ...

Les dromadaires (Camelus dromedarius) du désert d'Arabie peuvent absorber l'eau contenue dans l'air humide grâce à leurs narines spéciales.

PHOTOGRAPHIE DE Brooke Whatnall, Nat Geo Image Collection

Près de la Basse-Californie, au Mexique, le soleil tropical réchauffe les baïnes peu profondes à des températures dépassant les 35°C. Pourtant, même dans cet environnement extrême, de minuscules crustacés appelés Tigriopus californicus prospèrent.

Étonnamment, ces copépodes mexicains peuvent supporter des températures supérieures à celles supportées par des populations de la même espèce vivant dans le nord de la Californie. Pourtant, lors d'expériences menées en laboratoire, ils meurent rapidement lorsqu'ils sont exposés à de l'eau plus chaude.

À mesure que les « organismes se décomposent, leurs protéines commencent à fondre », explique Morgan Kelly, professeure de biologie à l'université d'État de Louisiane qui étudie ces crustacés de deux millimètres de long.

Cela donne à réfléchir sur la façon dont les espèces de la planète, des plus petits insectes aux plus grands mammifères, doivent s'adapter pour continuer de vivre sur une planète qui se réchauffe rapidement. La température globale de la Terre a augmenté de plusieurs degrés depuis 1880 et le rythme auquel elle se réchauffe est deux fois plus rapide aujourd'hui qu'il ne l'était en 1981.

Il reste cependant de l'espoir pour certains animaux. Les fourmis vivant en ville, du genre Temnothorax, peuvent évoluer sur plusieurs générations afin de pouvoir tolérer quelques degrés de plus, soit entre 46 et presque 48 degrés Celsius.

« L'évolution est un moyen important de se protéger », explique Sarah Diamond, maître de conférences en biologie à l'université Case Western Reserve, dans l’Ohio, qui a étudié les fourmis.

« Même si l'évolution ne suffit pas à suivre le rythme du changement climatique pour un grand nombre d'espèces que nous avons étudiées jusqu'à présent, elle peut nous permettre de gagner du temps. »

 

CERTAINS L'AIMENT CHAUD

De nombreuses espèces se sont intelligemment adaptées à la chaleur, en particulier celles qui vivent dans des environnements désertiques et arides. Certaines, comme celle du genre Sphincterochila, peuvent tolérer le soleil direct du Néguev, désert du sud de l’Israël, pendant quelques heures à une température de 55 degrés, et beaucoup plus longtemps à 50 degrés. Ces escargots restent en sommeil quand il fait très chaud, gardant de l'énergie pour les périodes de pluie lors desquelles ils se nourrissent et se reproduisent.

Le renard de Rüppell (Vulpes rueppellii) vit dans le désert de Lout, en Iran, où le mercure a atteint près de 71 degrés. Ce prédateur ne chasse que la nuit, lorsque les températures se rafraîchissent.

La fourmi argentée du Sahara construit des repaires souterrains pour échapper à des températures frôlant les 50 degrés et n'en sort que brièvement pour se nourrir.

Les ânes communs (Equus asinus asinus) et leur ancêtre, l'âne sauvage, ont évolué pour faire des réserves plutôt que de s'accoupler. L'âne sauvage d’Afrique (Equus africanus) est une espèce en danger critique d'extinction originaire de la Corne de l'Afrique dont le tempérament est plutôt solitaire. Il demeure près d’un point d'eau et s'accouple avec les femelles qui se présentent, explique Fiona Marshall, archéologue à l'université Washington de Saint-Louis qui étudie depuis longtemps la domestication des animaux africains et les changements climatiques.

« Tout le monde se plaint que les ânes sont têtus mais ils ont l'habitude d'être solitaires et de prendre leurs propres décisions », poursuit-elle.

Un renard de Rüppell au Sheikh Butti bin Juma Al Maktoum Wildlife Centre, aux Émirats arabes ...

Un renard de Rüppell au Sheikh Butti bin Juma Al Maktoum Wildlife Centre, aux Émirats arabes unis. Cet animal peut vivre dans des régions où l'eau manquerait presque, comme le centre de l'Arabie saoudite.

PHOTOGRAPHIE DE Joël Sartore, National Geographic, Photo Ark

La vie en troupeau convient aux animaux vivant dans des régions plus humides et luxuriantes, où la nourriture et l'eau sont abondantes. Ce n'est pas le cas pour les déserts clairsemés.

D'autres adaptations ont davantage trait au physique. Les chameaux, avec leurs proéminentes narines, sont capables d’absorber l'humidité de l'air lorsque qu’ils inspirent ou expirent.

D'autres animaux du désert, comme les rats kangourous et les wombats, extraient toute l'humidité présente dans la nourriture et déposent des excréments secs.

 

LE TEMPS PRESSE

Les espèces qui se sont adaptées à la chaleur sont-elles plus aptes à survivre sur une planète de plus en plus chaude ou n'auront-elles pas plus de chances que le reste d'entre nous ? Selon les chercheurs, cela dépend.

En règle générale, plus un organisme est petit, complexe et présent dans de nombreux endroits, plus il s'adapte rapidement au changement climatique.

C'est pourquoi une espèce comme la souris sylvestre (Peromyscus maniculatus) a plus de chances d'évoluer pour s’adapter à la chaleur que, par exemple, des éléphants menacés d’extinction, explique Martha Muñoz, professeure de biologie à l'université de Yale, dans le Connecticut. Des populations plus importantes offrent souvent une plus grande variation génétique pour le processus de sauvetage évolutif.

En outre, l'évolution nécessite du temps. Une bactérie peut se reproduire six fois par jour, ce qui permet un renouvellement rapide. Les baleines bleues (Balaenoptera musculus), en revanche, peuvent mettre jusqu'à quinze ans pour se reproduire.

Certaines espèces peuvent modifier leur comportement lorsqu'elles sont confrontées à des températures plus élevées, mais cela n'est pas sans conséquences.

Martha Muñoz et ses collègues ont constaté que les lézards du genre Anolis, vivant à la lisière des forêts des Caraïbes, allaient et venaient entre des endroits plus chauds et plus frais. Ils peuvent par exemple se cacher sous des rochers lorsqu’il fait chaud dans la journée. Ces reptiles n'ont modifié ni leur métabolisme ni aucun autre facteur physiologique lorsque les températures ont augmenté, ce qui a réduit la capacité de leurs générations futures à le faire.

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    Des souris sylvestres de Floride en captivité. Cette espèce se reproduisant rapidement, il est possible qu'elle s'adapte à la chaleur extrême plus rapidement que les animaux ayant une durée de vie plus longue.

    PHOTOGRAPHIE DE Joël Sartore, National Geographic, Photo Ark

    Leurs congénères des forêts, en revanche, ont développé une plus grande tolérance à la chaleur, augmentant ainsi leurs chances de survie. Ce phénomène évolutif porte même un nom : l'« effet Bogert ».

    Martha Muñoz a également constaté, comme dans le cas des fourmis du genre Temnothorax, que certaines espèces pouvaient évoluer rapidement. Dans une étude, Phrynosoma orbiculare, lézard du Mexique, a augmenté son seuil de tolérance à la chaleur à la suite d'une année de vagues de chaleur. 

    Muñoz prévient cependant que ces adaptations remarquables ne sont pas assez rapides pour suivre le rythme du réchauffement climatique.

    Ces animaux sont « en sursis et le temps leur est compté ».

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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