Un volcan de 9 000 mètres d'altitude aurait été découvert sur Mars

Si son existence est confirmée par la communauté scientifique, l'immense volcan pourrait s'avérer être un site intéressant pour de futures recherches de traces d'anciennes formes de vies microbiennes sur la planète rouge.

De Robin George Andrews
Publication 22 mars 2024, 10:28 CET
Cette image composite de Mars a été créée à partir de plus de 100 images prises ...

Cette image composite de Mars a été créée à partir de plus de 100 images prises par les orbiteurs du programme Viking de la NASA dans les années 1970. Bien que la planète rouge ait été photographiée en détail au fil des décennies, des scientifiques pensent avoir découvert un nouveau volcan, visible près d'un vaste réseau de grottes et de tunnels sur la gauche.

PHOTOGRAPHIE DE NASA, AP

Deux chercheurs auraient découvert un nouveau volcan sur la planète Mars, un véritable colosse qui s’élève à plus de 9 000 mètres d’altitude (soit un peu plus haut que l’Everest) et s’étend sur près de 450 kilomètres de long (soit un peu plus que la distance Paris-Lyon). Comme tous les volcans découverts sur Mars, ce dernier ne semble pas être en activité. Il pourrait par ailleurs être extrêmement ancien, et de ce fait, avoir été le témoin de la majeure partie des milliards d’années qui composent l’histoire de la planète rouge.

« Nous n’en revenions pas, il s’agissait d’un volcan géant et, pourtant, personne ne semblait l’avoir encore signalé », commente Pascal Lee, planétologue à l’institut SETI et l’un des deux scientifiques à l’origine de la découverte.

Lee et son partenaire de recherche ont présenté leurs conclusions lors de la Lunar and Planetary Science Conference (LPSC) qui s’est tenue la semaine dernière à The Woodlands, au Texas. Dans l’attente d’analyses plus approfondies de la part de la communauté scientifique, l’équipe a donné le nom provisoire « Noctis » à ce nouveau volcan, car celui-ci recouvrirait selon eux un vaste labyrinthe de canyons connu sous le nom de Noctis Labyrinthus, le « labyrinthe de la nuit ». La structure du volcan a été largement érodée, ce qui expliquerait pourquoi sa présence est passée inaperçue jusqu’à aujourd’hui.

 

L’ACTIVITÉ VOLCANIQUE SUR MARS

Cette découverte ne fait toutefois pas l’unanimité. Les travaux n’ont pas encore été évalués par des pairs et, bien qu’intrigués, ceux qui ont assisté à la présentation demeurent sceptiques.

« Les chercheurs ont présenté des arguments intéressants, mais pas entièrement convaincants », affirme Rosaly Lopes, planétologue au Jet Propulsion Laboratory de la NASA, qui n’était pas impliquée dans ces travaux. « La zone en question est très érodée. Il est difficile de se prononcer avec certitude. Mais je pense que la plupart d’entre nous estimons tout de même que l’idée est intéressante et mérite d’être étudiée davantage. »

Mars présentait autrefois une activité volcanique ; les éruptions y étaient nombreuses, aussi explosives qu’effusives, et les volcans pouvaient être absolument massifs, tout comme le célèbre Olympus Mons, qui est trois fois plus haut que l’Everest et est si lourd qu’il s’est enfoncé dans la planète.

Cette carte topographique montre ce qui, selon certains scientifiques, pourrait être un nouveau volcan baptisé Noctis. ...

Cette carte topographique montre ce qui, selon certains scientifiques, pourrait être un nouveau volcan baptisé Noctis. Celui-ci aurait été altéré par des millions d'années d'érosion, ce qui expliquerait pourquoi il ne présente pas la forme conique caractéristique d'un volcan.

Mosaïque de la Context Camera du Mars Reconnaissance Orbiter de la NASA, Modèle numérique de terrain de L'altimètre laser MOLA de la mission Mars Global Surveyor, Interprétation géologique et annotations de Pascal Lee et Sourabh Shubham

Bien que certains signes semblent indiquer que de nouvelles éruptions pourraient encore se produire un jour sur Mars, la majorité des scientifiques estiment que l’âge d’or volcanique de la planète est désormais derrière elle. De plus, même s’il arrive encore de découvrir de petits éléments volcaniques, beaucoup s’accordent pour dire que les structures les plus massives ont déjà toutes été identifiées. L’atmosphère de Mars est presque entièrement transparente et, sauf à l’occasion des tempêtes de poussière qui limitent parfois la visibilité, sa surface est observée de manière quasi continue par différents engins spatiaux, et ce depuis l’arrivée en 1971 de la sonde spatiale Mariner 9 de la NASA.

C’est pourquoi lorsque Lee et son collègue Sourabh Shubham, doctorant à l’Université du Maryland, ont affirmé avoir découvert un volcan géant, la communauté scientifique a été pour le moins surprise.

 

UNE HYPOTHÈSE INTÉRESSANTE

À l’aide d’une série de cartes créées au fil des missions orbitales des cinquante dernières années, les deux scientifiques étudiaient un champ de dépôts laissé par une activité volcanique explosive, et qui avait été entaillé par les restes d’un glacier. Afin de déterminer la provenance de ces matériaux volcaniques, les chercheurs ont alors observé les alentours de la zone et ont « vu quelque chose de remarquable » à l’extrémité orientale de Noctis Labyrinthus, se souvient Lee : la forme de ce qui, selon eux, serait un volcan érodé, surplombé par une fosse située sur un sommet partiellement effondré, et orné de coulées de lave, de couvertures de cendres volcaniques et de minéraux cuits par des écoulements d’eau chauffée par du magma.

En se basant sur son érosion avancée, sur la stratification de ses matières éruptives, et en comparant les fractures visibles à sa surface avec celles de Noctis Labyrinthus (dont la période de formation approximative a été déterminée), les chercheurs estiment que le volcan s’est formé il y a plus de 3,7 milliards d’années et a continué son activité jusqu’à récemment, il y a peut-être 10 millions d’années seulement.

« Nous avons ici un volcan qui a été actif durant la majeure partie de l’histoire géologique de Mars », explique Lee. La présence d’une source de chaleur prolongée en plein milieu d’une zone autrefois ornée de glaciers pourrait s’avérer intéressante à explorer à l’aide d’un rover ; un site ancien de bassins chauds comme celui-ci pourrait en effet renfermer des traces d’une vie microbienne passée.

Il est toutefois difficile d’affirmer avec certitude que les éléments identifiés par les chercheurs comme des dépôts d’éruption ou des reliefs volcaniques sont bien continus et d’origine volcanique. Le reste de la communauté scientifique reste donc sceptique.

« Ces données ne suffisent pas à me convaincre qu’il s’agit bien d’un volcan », affirme Tracy Gregg, volcanologue planétaire à l’Université de Buffalo. « Un cratère d’impact rempli et érodé pourrait présenter des caractéristiques similaires. »

Ainsi, aussi attrayante que soit cette hypothèse, des preuves supplémentaires seront nécessaires pour affirmer avec certitude que ce que les deux chercheurs ont observé est bel et bien un immense volcan passé inaperçu pendant plusieurs décennies.

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    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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