Charlemagne, le roi des Francs devenu empereur
La chute de Rome entraîna le chaos en Europe occidentale. Entra alors en scène Carolus Magnus, plus connu sous le nom de Charlemagne, qui chercha à tout prix à imposer des changements culturels, économiques et religieux radicaux.
Ce buste de Charlemagne, créé vers 1350, est conservé à la cathédrale d'Aix-la-Chapelle, en Allemagne, dernière demeure du souverain. La partie supérieure du crâne de Charlemagne est intégrée dans le buste. Bien qu’illettré, Charlemagne, né Carolus Magnus et couronné Charles le Grand, était intelligent et curieux. Il usa de son pouvoir pour promouvoir l'éducation et les arts, une entreprise qui permit plus tard à l'Europe de sortir du Haut Moyen Âge.
La chute de l’Empire romain en 476 laissa une immense brèche en Europe occidentale. Sans autorité centrale, les royaumes fracturés se livrèrent une guerre intense. Les citoyens durent lutter pour survivre tandis que les arts et l’éducation disparaissaient. L’Europe entra dans le Haut Moyen Âge, une période chaotique correspondant au début du Moyen Âge. Au milieu de cette époque troublée naquit en 742 un garçon nommé Carolus Magnus : Charles le Grand. Plus connu sous le nom de Charlemagne, cet héritier de la dynastie carolingienne devint l’un des plus grands dirigeants de l’Europe, contribuant à l’établissement d’une civilisation plus éclairée et plus élevée.
AVANT CHARLEMAGNE
Avant l'époque de Charlemagne, les forces musulmanes s’étaient déplacées vers le nord jusqu’en Europe. Soutenus par le puissant calife de Damas, les musulmans berbères, ces peuples originaires d’Afrique du Nord aussi connus sous le nom de Maures, occupèrent l’Espagne en 711 et y restèrent pendant plus de 700 ans. Les musulmans exerçaient alors un contrôle économique et politique presque total sur la Méditerranée.
Les musulmans franchirent les Pyrénées et pénétrèrent les royaumes francs, ce qui leur valut un autre surnom : les Sarrasins. Bien qu’il eût réussi à les retarder à Toulouse en 721, Eudes d’Aquitaine, un duc franc, ne parvint pas à stopper l’avancée des musulmans et demanda l’aide d’un autre franc, Charles Martel, le grand-père de Charlemagne.
L’AVÈNEMENT DES CAROLINGIENS
Fils illégitime d’un noble franc, Charles Martel était parvenu à diriger les royaumes francs. Charles joignit ses forces à celles du duc Eudes pour affronter les Sarrasins et, grâce à son génie militaire, les Francs repoussèrent les Maures à la bataille de Tours en 732. D’autres incursions musulmanes eurent lieu au cours des années suivantes, mais les Francs, unis sous la direction de Charles, prouvèrent qu’il était possible de les arrêter.
Avec Charles Martel vit le jour une nouvelle dynastie, les Carolingiens, du latin Carolus, ou Charles. Pépin le Bref, fils de Charles Martel, obtint la bénédiction du pape et devint le premier roi carolingien. Il signa un pacte avec les chefs de l’Église, promettant qu’en échange du soutien ecclésiastique, il protégerait à jamais la papauté à Rome et la chrétienté dans le monde. Pépin était le père de Charlemagne.
Cette peinture représente la bataille de Poitiers, qui eut lieu le 25 octobre 732 et dont Charlemagne sortit victorieux.
LA NAISSANCE D’UN SOUVERAIN
Les historiens ignorent le lieu de naissance exact de Charlemagne, mais s’accordent à dire qu’il serait né à Liège, dans l’actuelle Belgique ou à Aix-la-Chapelle, dans l’actuelle Allemagne. Quant à son enfance, on en sait peu de choses si ce n’est qu’il reçut probablement une éducation politique, linguistique et militaire, bien qu’il fût analphabète.
Ce dont on est sûr, en revanche, c’est que Pépin mourut en 768 et qu’ainsi débuta le règne de Charlemagne. Enfin pas exactement puisqu’un de ses frères, Carloman, régna avec lui, non sans différends, jusqu’au décès de ce dernier en 771. Charlemagne hérita de terres qui s’étendaient de la France actuelle jusqu’aux Pays-Bas et dans une partie de l’Allemagne occidentale.
Soucieux d’unir tous les peuples germaniques en un seul royaume et de convertir ses sujets au christianisme, Charlemagne se lança dans une série de campagnes militaires : il fomenta plus de cinquante batailles, qu'il dirigea pour la plupart lui-même. Peu après son accession au trône, il conquit la majeure partie de l’Europe continentale, battant ainsi les puissants Lombards (dans l’actuel nord de l’Italie), les Avars (un groupe de riches nomades asiatiques vivant dans l’Autriche et la Hongrie actuelles) et les Bavarois.
Il lui fallut cependant trente-deux ans pour triompher des Saxons, une tribu germanique de païens. Le point culminant de cette campagne fut le massacre de Verden en 782, au cours duquel Charlemagne aurait ordonné la mort de 4 500 Saxons, parce qu'ils refusaient de se convertir au christianisme.
Ce tableau représente une bataille célèbre à laquelle participa Charlemagne, qui dura trois jours et deux nuits. Au cours de celle-ci, un ange lui serait apparu et l’aurait aidé à remporter la victoire. Il fonda l’abbaye écossaise de Ratisbonne en remerciement.
UN NOUVEL EMPEREUR
Pour sa dévotion à la chrétienté et pour avoir protégé la papauté, le pape Léon III couronna Charlemagne empereur des Romains à la basilique Saint-Pierre de Rome, le jour de Noël de l'an 800. Il devint alors le premier empereur à régner sur l’Europe depuis la chute de l’Empire romain. Bien que Charlemagne n’eût pas gagné de territoire substantiel, le couronnement créa une confédération qui allait durer un millier d’années : le Saint Empire romain germanique. De nombreux historiens imputent à Charlemagne le fait d’avoir répandu le christianisme dans ces régions autrefois païennes, et d’avoir apporté une culture commune et une certaine homogénéité à des tribus disparates.
Il était si redoutable que les dirigeants de l’Empire byzantin, le prolongement de l’Empire romain dans les provinces orientales, le reconnurent formellement comme le véritable empereur de la Rome occidentale, l’héritier de la Rome classique et le défenseur de la foi chrétienne.
LA RENAISSANCE CAROLINGIENNE
Devenu empereur romain, Charlemagne institua des réformes culturelles, économiques et religieuses qui stimulèrent la renaissance carolingienne. Il valorisait l’érudition, les arts et la littérature, et améliora la littéracie de son peuple, répandant et promouvant l’enseignement qui avait si longtemps émané de Rome. Il encouragea la scolarisation dans tout le royaume en latin, sa langue maternelle, et préconisa fortement l'utilisation de la minuscule caroline, une forme d’écriture normalisée qui devint la base des alphabets imprimés européens modernes.
Charlemagne entreprit de vastes réformes économiques, notamment en dotant toute l’Europe de la même monnaie en argent, ce qui facilita le commerce transfrontalier. Les régions d’Europe autrefois disparates furent alors reliées par des réseaux commerciaux pacifiques et purent communiquer entre elles. Le continent prospérait.
Cette peinture représente le couronnement de l’empereur Charlemagne le 25 décembre 800 à Rome par le pape Léon III.
UN EMPEREUR ATTACHÉ À SES RACINES
Charlemagne régna depuis plusieurs villes de son empire, mais son port d’attache demeura Aix-la-Chapelle, dans l’actuelle Allemagne. Bien que petite comparée à de nombreuses villes européennes importantes, et au centre de l’attention pendant une période relativement courte d’environ cinquante ans, Aix-la-Chapelle devint le berceau de la civilisation carolingienne. Charlemagne y ordonna la construction d’un palais et d’une cathédrale, pour laquelle aucune dépense ne fut épargnée. Son palais comprenait une école qui recrutait les meilleurs enseignants du pays.
Seuls quelques-uns des bâtiments du palais carolingien ont survécu à l’épreuve du temps. Parmi eux, la chapelle palatine de la cathédrale d’Aix-la-Chapelle constitue un exemple typique du style carolingien.
LA FIN D’UNE DYNASTIE
Lors de sa dernière année de règne, Charlemagne fit de son fils Louis le Pieux, roi d’Aquitaine, son co-empereur. Quand Charlemagne mourut en 814, après un règne de plus de quarante ans, Louis devint le seul empereur. Le royaume de Charlemagne n’avait cependant pas les fondements nécessaires pour perdurer. Louis resta au pouvoir jusqu’en 840, mais il manquait de qualités d'homme d’État et de guerre, et l’empire se désagrégea. Toutes ces décennies de règne ne furent cependant pas vaines. Bien que de courte durée, la dynastie carolingienne, sous l’égide de Charlemagne, fut à l’origine de la renaissance culturelle de l’Europe.
Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.