Des siècles de légendes : Hanumān, dieu hindou au visage de singe
Les exploits épiques d’Hanumān, ce dieu au corps d’homme et au visage de singe, sont relatés depuis des siècles. Aujourd’hui, sa légende fait l’objet d'un nouveau film.
Cette peinture murale dans un temple thaïlandais représente Hanuman parti à la recherche d’herbes rares pour guérir Lakshmana, le jeune frère de Rama.
Hanumān a le visage d’un singe et le corps d’un homme, une couronne en or et une longue queue qui l'accompagne dans tous ses mouvements. Le dieu hindou est souvent représenté la poitrine ouverte pour révéler l’image de Rāma, incarnation du dharma et septième avatar de Vishnu, le dieu de la protection et du temps.
Après des milliers d’années, Hanumān est toujours vénéré dans la culture hindoue. Le nouveau film Monkey Man s’inspire de la légende d’Hanumān, le personnage incarné par Dev Patel représentant la loyauté et la dévotion du dieu alors qu'il cherche à venger la mort de sa mère.
LES ORIGINES D’HANUMĀN
Également connu sous les noms de Maruti, Bajrangabali et Ajaney, Hanumān est bien plus qu’un dieu singe : c’est le dieu du courage, de la force et de l’autodiscipline. Hanumān joue un rôle central dans le Rāmāyana, l’une des plus grandes épopées mythologiques jamais écrites.
Le Rāmāyana, attribué au sage Vālmīki, est le plus ancien texte faisant référence au dieu singe ; les spécialistes estiment qu’il aurait été écrit aux alentours du 3e siècle avant notre ère. L’épopée suit le prince Rāma, exilé, qui traverse l’océan pour délivrer sa femme Sītā du roi maléfique Ravana.
Hanumān apparaît à de nombreuses reprises dans le texte, mais son exploit le plus connu est sans doute le fait d’avoir dirigé une armée de singes pour aider Rāma à sauver Sītā. Hanumān est également mentionné dans l’épopée du Mahabharata et dans les Puranas, un genre littéraire hindou traitant de légendes et d’autres traditions.
Le Hanumān Purana, qui raconte la naissance d’Hanumān, présente Vāyu, le dieu du vent, comme le père du dieu singe. La mère d’Hanumān, Añjanā, était une apsara (sorte de nymphe ou de fée) qui fut transformée en singe par un sage en colère. Ce dernier expliqua qu’Añjanā pourrait retrouver sa forme originelle si elle mettait au monde un fils puissant : elle y parvint avec Hanumān, dont la force se manifesta dès l’enfance.
Dans l’une des histoires les plus connues d’Hanumān, ce dernier bondit dans le ciel au lever du soleil, pensant que le soleil est une boule jaune ou un fruit mûr.
Il est écrit dans le Rāmāyana de Vālmīki que le roi des dieux, Indra, frappa le dieu singe de sa foudre pour le faire tomber du ciel. La foudre l’atteignit à la mâchoire et il retomba au sol, raide mort. Vāyu, furieux de ce qu’Indra avait fait à son fils, priva la Terre de son air, laissant ainsi souffrir tous les êtres vivants. Ce n’est que lorsque Shiva, le dieu du temps et de la destruction et l’une des principales divinités de l’hindouisme, ressuscita Hanumān, que Vāyu rendit l’air à la planète. Indra, réalisant son erreur, fit don à Hanumān d’un corps aussi fort que son vajra (foudre), et l’immunisa aussi contre les éclairs.
D’autres dieux accordèrent également des pouvoirs à Hanumān, dont une immunité supplémentaire contre les dommages causés par le feu, le vent et l’eau. Il fut également rendu immortel, ce qui lui permit de devenir un guerrier fort et habile qui joua un rôle crucial dans le Rāmāyana. La version de Valmiki du Rāmāyana raconte comment, au cours d’une bataille, Hanumān transporta tout un pic montagneux depuis l’Himalaya dans l'unique but d'apporter des herbes pour soigner les soldats sur le champ de bataille.
Malgré ses exploits et son immortalité, Hanumān est un dieu humble et désintéressé, entièrement dévoué à Rāma tout au long du Rāmāyana, du Mahabharata et des Puranas.
L’IMPORTANCE DES ANIMAUX DANS LE PANTHÉON HINDOU
Dans les représentations populaires, Hanumān apparaît souvent sous la forme d’un singe au visage rouge, cette couleur représentant sa dévotion à Rāma. Les entelles d’Hanumān (Semnopithecus entellus), ces singes originaires du sous-continent indien sont considérés comme sacrés en raison de la coloration foncée de leur visage et de leurs mains, qui rappelle les brûlures subies par Hanumān au cours de ses aventures.
Les animaux occupent une place de choix dans le panthéon hindou. Ganesh, le dieu de la prospérité et de la sagesse à tête d’éléphant, ainsi que Narasimha et Hayagrīva, les avatars de Vishnu à tête de lion et de cheval, sont des exemples encore plus frappants de dieux animaux.
« Les frontières entre les dieux, les animaux et les humains sont malléables et fluides », explique Ankur Barua, maître de conférences en études hindoues à l’université de Cambridge. « Il peut y avoir du sacré non seulement dans la forme humaine, mais aussi dans les formes animales et végétales, et dans toutes les formes d’êtres vivants. »
HANUMĀN DANS LES COMMUNAUTÉS INDO-CARIBÉENNES
Pour les communautés indo-caribéennes, les histoires d’Hanumān et de Rāma font écho à l’Histoire.
Bien que Rāma ait été contraint de vivre en exil, Hanumān est resté un fidèle dévot. « Comme notre peuple a été déplacé de sa patrie et envoyé dans les Caraïbes, nous entretenons un lien différent à l’histoire et considérons Hanumān comme l’exemple même du dévot », explique Vinay Harrichan, fondateur de Cutlass Magazine, une plateforme dédiée à la communauté indo-caribéenne.
Les dualités d’Hanumān, entre paix et férocité, espièglerie et protection, reflètent également l’histoire indo-caribéenne. « Lorsque [l’hindouisme] est arrivé dans les Caraïbes, il est soudainement devenu une religion minoritaire avec le colonialisme et l'évangélisation par des missionnaires », explique Harrichan. « Ce qui a toujours été central dans l’hindouisme indo-caribéen, c’est qu'il s'agit d'une communauté pacifique, aimante et tolérante, mais aussi farouche en ce qui concerne la protection de ses croyances et des choses qu’elle considère comme sacrées. »
Chaque année, la plupart des foyers hindous indo-caribéens organisent une puja dédiée à Hanumān, lors de laquelle ils prient pour la prospérité et la santé. Dans le cadre de ce rituel, ils érigent un drapeau rouge sur leur propriété, montrant ainsi que Hanumān a béni la famille et sa terre.
Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.