La crise liée à la COVID-19 a-t-elle changé notre regard sur la science ?

La parole scientifique était énormément présente lors de la récente crise liée à la COVID-19. Comment les discours scientifiques sont-ils perçus depuis ? Ont-ils permis un gain de confiance auprès des citoyens ?

De Mehdi Benmakhlouf
Publication 3 juil. 2020, 15:34 CEST
Emma Rogers, une résidente de première année en médecine d'urgence photographiée à l'extérieur du Penn Presbyterian ...

Emma Rogers, une résidente de première année en médecine d'urgence photographiée à l'extérieur du Penn Presbyterian Medical Center, à Philadelphie, estime que l'épidémie de COVID-19 a rassemblé la communauté locale autour de l'hôpital.

PHOTOGRAPHIE DE Mark Thiessen, National Geographic

Einstein était profondément convaincu qu’un scientifique a le devoir de communiquer avec le public : « Si la science, comme l’art, doit accomplir pleinement sa mission, ses réalisations doivent agir non seulement en surface mais aussi avec leur signification profonde dans la conscience des gens ».

La pandémie de COVID-19 a contribué, en France comme à l’étranger, à démocratiser la parole scientifique. Que cela soit sur les plateaux de télévision, radio ou en conférence de presse, les scientifiques ont occupé une grande part du débat public.

L’expertise des virologues, des épidémiologistes, des microbiologistes et le savoir-faire des médecins et du personnel soignant ont permis d’informer les citoyens sur la connaissance de ce coronavirus et sur sa propagation. Les scientifiques ont joué un rôle très important dans la lutte contre les nombreuses fausses informations qui ont circulé.  

« Je pense qu’avec tous les réseaux sociaux et les médias, il y a une assez grande présence du discours scientifique sur différents sujets. Ce qui peut être problématique, c'est la présence de discours très différents. La difficulté est de savoir comment aider les citoyens à se faire une idée de la qualité et la valeur des discours qui sont tenus » affirme Olivier Borraz, directeur de recherche CNRS et directeur du centre de sociologie des organisations de Sciences Politiques.

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    L’actualité interroge sur la place de la recherche et de la science et leurs rôles dans les médias mais aussi de la transmission des connaissances scientifiques. « À mon avis, les chercheurs doivent expliciter leurs méthodes, les protocoles, la démarche dans laquelle ils s’inscrivent pour gagner la confiance des citoyens mais ils doivent aussi être indépendants » poursuit Olivier Borraz. « Il y a quelque chose à construire dans la capacité pour les scientifiques de faire part des doutes qu’ils peuvent avoir, des incertitudes mais tout en étant capables d’argumenter les recommandations qu’ils font ».

    Cette crise a également permis à un grand nombre de femmes médecins de prendre la parole, comme la virologue au CHU de Lille et enseignante à la faculté de Pharmacie de Lille qui confiait le 21 mai 2020 à nos confrères de France Culture que cette crise avait permis de voir « des femmes cheffes de service dans des hôpitaux, dans des CHU qui sont venues prendre la parole, qui ont montré qu’elles sont cheffes de service. C'est important pour nous, mais aussi pour les plus jeunes ».

    Graphique montrant le pourcentage de confiance d'un échantillon de la populationL’enquête Ipsos-Cevipof, conduite sur les attitudes des ...

    Graphique montrant le pourcentage de confiance d'un échantillon de la populationL’enquête Ipsos-Cevipof, conduite sur les attitudes des citoyens face au Covid-19 mettait en évidence, à partir d’un niveau initial de confiance envers les scientifiques élevé (autour de 85 %), une diminution de 10 points pendant le mois d’avril. 

    PHOTOGRAPHIE DE Ipsos-Cevipof

    Une enquête Ipsos-Cevipof, menée auprès d’un échantillon de 5 000 personnes entre le 16 mars et le 30 avril 2020, a mis en évidence une baisse de confiance de près de 10 % envers les chercheurs par les sondés.

    Le niveau initial de confiance plutôt élevé, autour de 85 %, s’établissait à 75 % à la fin de l’expérience. Cette diminution de confiance pourrait s’expliquer par une surcharge d’informations, les citoyens n’arrivant pas à distinguer ce qui leur semblait vrai de ce qui lui semblait faux, perdus dans un foisonnement d’avis scientifiques divergents.

    Au total, 77 % de la population interrogée considère, compte tenu de l’état de la science sur ce coronavirus, n’avoir ni plus ni moins confiance dans la science qu’auparavant et la part de la population qui se dirait plus confiante envers la science serait les 18-29 ans, qui se distinguent par un gain de confiance un peu plus élevé que la moyenne.

    « Les chercheurs ont parfois des difficultés à s’exprimer d’une même voix et parfois une surexposition médiatique révèle la volonté de gagner des intérêts qui ne relèvent pas du domaine scientifique » conclut Olivier Borraz

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