Votre style d'éducation a-t-il une influence majeure sur votre enfant ?

La parentalité "phare", "tigre", "chasse-neige" ou encore "panda"... choisir un style d'éducation adapté s'apparente souvent au casse-tête pour les nouveaux parents.

De Stacey Colino
Publication 13 janv. 2025, 13:30 CET
Faut-il tenir la main de son enfant sur une poutre d'équilibre ou n'intervenir que s'il est ...

Faut-il tenir la main de son enfant sur une poutre d'équilibre ou n'intervenir que s'il est sur le point de tomber ? Votre réponse reflète peut-être votre style parental et, selon les experts, ce dernier peut avoir une incidence sur le développement de votre enfant.

PHOTOGRAPHIE DE Michael Staudt, VISUM, Redux

Nous vivons à l’ère de la parentalité métaphorique. Des parents « tigre » et « hélicoptère », en passant par les parents « chasse-neige » et « libres », toutes sortes de termes ont été utilisés pour décrire les nombreux styles d’éducation. La parentalité « douce » semble aujourd’hui attirer une attention particulière.

Cependant, de nombreux parents s’interrogent : ces styles d’éducation font-ils une réelle différence dans le développement et le bien-être futur de leur enfant ?

« Les parents sont avides de réponses et ces messages deviennent attrayants sur les réseaux sociaux », explique Annie Pezalla, psychologue du développement et professeure adjointe de psychologie au Macalester College de Saint Paul, dans le Minnesota. En tant que société, « nous devenons de plus en plus conscients de ce que nous devons dire, faire ou ne pas faire ; nous partons du principe que, si nous disons ou faisons la mauvaise chose, nous pourrions abîmer durablement nos enfants », affirme-t-elle.

Pour ces mêmes raisons, les scientifiques s’interrogent depuis longtemps sur l’influence du choix de style parental sur le développement des enfants. Dans les années 1960, en se basant sur les recherches à sa disposition, la psychologue Diana Baumrind est parvenue à identifier trois approches parentales distinctes : l’éducation autoritaire, qui se caractérise par des règles strictes, des attentes élevées et une discipline souvent sévère ; l’éducation démocratique, qui prend la forme d’une relation parent-enfant étroite et protectrice destinée à guider les enfants à répondre à des attentes élevées ; et l’éducation permissive, qui se caractérise par une relation aimante accompagnée de peu de règles ou attentes, qui laisse les enfants gérer les situations par eux-mêmes. Plus tard, un quatrième style, l’éducation négligente (ou distante), a été ajouté à la liste.

Toutefois, le problème de ces premières caractérisations était que « les parents ne pouvaient pas s’identifier à ces mots », commente Kenneth Ginsburg, médecin, fondateur et directeur de programme du Center of Parent and Teen Communication à l’hôpital pour enfants de Philadelphie. « Si vous voulez aider les parents à savoir ce qu’ils doivent faire et dire, il faut créer un nouveau nom. »

C’est ainsi que de nouveaux styles parentaux dotés de noms plus métaphoriques ont vu le jour.

Contrairement aux styles parentaux traditionnels, ces derniers n’ont pas fait l’objet d’autant de recherches et peuvent donc avoir des significations différentes selon les individus. Voici ce que pensent les experts de six de ces nouveaux styles parentaux et de leurs conséquences potentielles dans le développement des enfants.

 

LA PARENTALITÉ DOUCE

Connue pour donner la priorité à la compassion, à la chaleur et au respect, l’approche de la parentalité douce, ou « gentle parenting », a gagné en popularité ces dernières années. L’une des principales caractéristiques de ce style d’éducation est l’accent mis sur le développement d’un lien fort entre les enfants et leurs parents.

« Il s’agit d’aborder l’éducation en faisant preuve d’une écoute profonde ; autrement dit, en étant capable de voir les choses du point de vue de l’enfant », explique Sarah Bren, psychologue clinicienne agréée et cofondatrice du Upshur-Bren Psychology Group à Pelham, dans l’État de New York. Selon la manière dont les limites sont fixées et dont la discipline est gérée, cette méthode peut ressembler à une éducation démocratique ou permissive, d’après les experts.

« Les enfants s’en sortent bien lorsqu’ils reçoivent de la chaleur et de la discipline », indique Pezalla, mais ce style d’éducation douce peut être difficile à maintenir pour les parents. Une étude dirigée par Pezalla publiée en 2024 dans la revue PLoS One a en effet révélé qu’un tiers des individus qui s’identifiaient comme des « parents doux » exprimaient des doutes quant à leurs capacités parentales et éprouvaient un sentiment d’épuisement. Quant à savoir si cette approche parentale a un meilleur effet sur les enfants que d’autres méthodes, des études approfondies doivent encore être menées.

 

LA PARENTALITÉ CHASSE-NEIGE

Les parents qui adhèrent au style d’éducation qualifié de « chasse-neige », ou « bulldozer », essaient souvent d’éliminer tous les obstacles qui se dressent sur le chemin de l’enfant. Malgré les bonnes intentions des parents, qui veulent éviter à tout prix que leurs enfants se retrouvent confrontés à des difficultés, cet objectif n’est pas réaliste, car les défis font partie inhérente de la vie.

En tant que parent, « l’objectif doit être d’apprendre à vos enfants à gérer l’adversité ou les conflits avec votre soutien et vos conseils afin de les aider à développer leur résilience », commente Bren. Si vous éliminez trop fréquemment tous les obstacles qui se trouvent sur leur chemin parce que vous avez peur qu’ils ne puissent pas les gérer, vous risquez d’accomplir l’inverse de votre objectif, ajoute Bren, car ils ne sauront pas comment réagir le jour où ils y seront inévitablement confrontés.

Cette approche est principalement fondée sur la peur, mais celle-ci peut se retourner contre vous. Des recherches ont montré que, lorsque les parents sont anxieux face aux menaces potentielles auxquelles leurs enfants peuvent être confrontés dans le monde, cette anxiété peut être transmise aux enfants, et ainsi contribuer à leur propre anxiété et à leur intolérance à l’incertitude.

 

LA PARENTALITÉ HÉLICOPTÈRE

Si ce terme fait référence aux « parents poules » qui « planent » au-dessus de leurs enfants, il désigne également la tendance des parents à être contrôlants et surprotecteurs, prêts à intervenir à tout moment pour les aider.

Néanmoins, comme dans le cas de la parentalité chasse-neige, « cette volonté excessive de tout gérer n’apprend pas aux enfants à changer de direction, à surmonter les obstacles ou à développer leur résilience », prévient Michele Borba, psychologue de l’éducation établie dans le sud de la Californie et autrice de l’ouvrage de Thrivers: The Surprising Reasons Why Some Kids Struggle and Others Shine. En conséquence, « l’enfant devient dépendant, vous le privez de son autonomie ».

Par ailleurs, des recherches ont établi un lien entre la parentalité hélicoptère pratiquée par les mères et une plus grande consommation d’alcool chez leurs filles adolescentes, bien qu’il soit important de préciser que l’étude démontrait une corrélation, et non une causalité directe, entre ces deux phénomènes. Une autre étude publiée dans la revue Frontiers in Psychiatry en 2024 a également montré que cette méthode d’éducation était associée à davantage de dépression et à moins d’estime de soi à l’égard de l’apparence physique chez les étudiants.

 

LA PARENTALITÉ LIBRE, OU PARENTALITÉ PANDA

Une mère panda géant berce son petit au Wolong China Conservation and Research Center. La parentalité ...

Une mère panda géant berce son petit au Wolong China Conservation and Research Center. La parentalité « panda », également connue sous le nom de parentalité libre, est une approche d'éducation qui met l'accent sur l'indépendance et la liberté de l'enfant par rapport à ses parents.

PHOTOGRAPHIE DE Ami Vitale, Nat Geo Image Collection

À l’opposé des parentalités hélicoptère et chasse-neige, la parentalité libre, également appelée parentalité « panda », met l’accent sur l’indépendance et la liberté de l’enfant.

Ce style d’éducation peut aider les enfants à développer leur autonomie et leur confiance en eux. « Il permet aux enfants de se comporter comme des enfants et de faire ce qu’ils ont à faire », décrit Bren.

Les enfants peuvent toutefois se retrouver avec trop de liberté dans des domaines de la vie qu’ils ne sont pas encore prêts à gérer, ce qui, à terme, peut également poser problème. C’est pourquoi, selon Borba, il est important de se baser sur leurs capacités spécifiques et d’offrir des conseils ou un « échafaudage », comme elle le décrit, pour les aider à rester en sécurité. « Il faut garder à l’esprit que nos enfants vivent une enfance bien différente de la nôtre. Tout va plus vite, la peur est plus présente, et ils sont nés avec le numérique. »

Certaines recherches suggèrent néanmoins que le fait d’encourager la mobilité indépendante d’un enfant, définie comme la liberté « de se déplacer dans son quartier ou sa ville sans la supervision d’un adulte », est associé à une meilleure santé physique et à un meilleur bien-être psychologique.

 

LA PARENTALITÉ TIGRE

Bien que moins populaire de nos jours, la parentalité « tigre » existe toujours et a fait l’objet de recherches plus approfondies que beaucoup d’autres styles parentaux.

Popularisée en 2011 par la publication des mémoires d’Amy Chua, L’Hymne de bataille de la mère Tigre, cette parentalité adopte une approche stricte et exigeante, accompagnée de niveaux d’attentes élevés et de niveaux de soutien émotionnel plus faibles. « Elle est axée sur le parcours professionnel et pousse trop l’enfant à atteindre les objectifs des parents plutôt que de s’intéresser à ce qui le motive en fonction de sa personnalité », explique Borba.

Des recherches ont démontré que ce modèle d’éducation était associé à des réactions plus intenses face au stress chez les enfants, mesurées par le taux de cortisol. Selon d’autres études, les enfants élevés avec cette méthode seraient également plus susceptibles de développer de l’anxiété, des symptômes dépressifs et un plus grand sentiment d’aliénation par rapport à leurs parents.

 

LA PARENTALITÉ PHARE

L’un des styles parentaux les plus récents, la parentalité « phare » (ou « lighthouse parenting »), un terme inventé par Ginsburg, se situe à mi-chemin des méthodes précédentes : elle n’est pas aussi stricte ou contrôlante que la parentalité tigre, mais n’est pas non plus aussi passive que la parentalité panda.

Ici, l’idée est d’offrir des conseils et une source de soutien constante aux enfants, comme un phare qui guide un navire dans l’obscurité, tout en leur permettant de naviguer en toute autonomie. « Il s’agit de rester toujours présent [pour aider en tant que parent], mais de ne pas rapprocher le phare de l’enfant », explique Borba. Les parents qui suivent cette méthode peuvent intervenir pour protéger leurs enfants d’un véritable danger, mais pas parce qu’ils veulent ou ressentent le besoin de les contrôler, note Ginsburg.

« Ce terme est tout nouveau, mais il s’agit en réalité d’appliquer ce que nous avons appris de la parentalité équilibrée, qui est une forme de parentalité démocratique », ajoute Ginsburg, autrice de l’ouvrage Lighthouse Parenting: Raising Your Child With Loving Guidance for a Lifelong Bond. « Si les parents jouent le rôle de guides aimants et fixent des limites appropriées, les enfants s’en sortent mieux et leurs relations sont les plus solides. »

Des recherches ont en effet montré que la parentalité démocratique était associée à de meilleurs résultats scolaires, à une plus grande auto-efficacité, ainsi qu’à une plus grande confiance en soi et à une meilleure autorégulation émotionnelle chez les enfants et les adolescents. « Si vous voulez que votre enfant réussisse et s’adapte bien, vous devez adopter un style démocratique », explique Borba.

 

LES CARACTÉRISTIQUES D’UNE PARENTALITÉ EFFICACE

Métaphores et surnoms mis à part, certaines caractéristiques sont essentielles pour garantir une parentalité sereine et efficace. La première, selon Bren, consiste à créer un style d’attachement sécurisant avec votre enfant. « La question la plus importante est la suivante : l’enfant se sent-il suffisamment en sécurité, vu et apaisé par son parent pour se sentir en confiance ? »

Pour cela, il est important d’être à l’écoute de ses émotions, mais aussi d’être aimant, chaleureux, structuré et patient, explique Borba. Des recherches suggèrent que la disponibilité émotionnelle des parents serait bénéfique au fonctionnement et au développement neurobiologique de l’enfant.

Il est également important que le parent soit capable de voir le monde à travers les yeux de son enfant, et de l’aider à avoir un sentiment d’individualité et à se sentir à l’aise avec tous ses sentiments. Ce sont là les caractéristiques d’un amour inconditionnel.

Si les limites et la cohérence sont importantes dans l’éducation des enfants, la flexibilité l’est tout autant, estime Ginsburg : « Ce qui change, c’est la place que vous accordez à votre rôle de guide. L’objectif est de favoriser l’interdépendance et la capacité à s’épanouir. »

Ces qualités parentales équilibrées peuvent également contribuer à créer des liens solides entre parents et enfants. « Lorsque vous exercez votre rôle de parent avec amour, votre enfant vous voudra toujours dans sa vie », conclut Ginsburg.

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    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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