Inde : au Ladakh, on vit au rythme du tourisme responsable

De plus en plus d'établissements visent à offrir des séjours qui riment avec écologie et développement durable dans cette région montagneuse confrontée au surtourisme et à un déclin environnemental.

De Charukesi Ramadurai
Publication 1 sept. 2023, 12:18 CEST
View_of_Stok_Palace

Le Stok Palace Heritage Hotel, dans le Ladakh, en Inde, abrite toujours la famille royale Namgyal, qui loue trois de ses suites à des visiteurs. Cette résidence vieille de 200 ans est l'un des nombreux hébergements de cette région populaire du nord de l'Inde qui partagent la culture et les arts ladakhis avec les voyageurs.

PHOTOGRAPHIE DE HH Jigmed Namgyal

L'hôtelier Rigzin Namgyal se souvient avec émotion de la vieille époque, celle durant laquelle seules les personnes véritablement curieuses et aventurières se rendaient au Ladakh. Lorsque cette région d’Inde du Nord s'est ouverte aux touristes au milieu des années 1970, seules quelques personnes voyageant avec leur sac à dos entreprenaient chaque année le long et éprouvant voyage par la route partant de Manali, dans l'État voisin de l'Himachal Pradesh, franchissant de dangereux cols de montagne.

« Elles avaient à cœur de découvrir notre histoire et notre culture, notre flore et notre faune », explique Rigzin Namgyal. « Elles étaient prêtes à sortir de leur zone de confort et à loger chez l'habitant pour vivre cette expérience. »

Un blockbuster bollywoodien sorti en 2009 a mis en lumière les paysages époustouflants de cette région, et depuis plusieurs compagnies aériennes ont lancé des vols court-courriers au départ de New Delhi... et le Ladakh a été envahi par les touristes. Presque du jour au lendemain, des maisons d'hôtes et des voyagistes ont poussé comme des champignons, de manière désorganisée, sans réglementation appropriée, mettant à mal le fragile écosystème de ce désert de haute altitude.

Construit en 1600, le palais de Leh, capitale de l'État du Ladakh, offre une vue imprenable sur la ville. Entourée par des pics montagneux, celle-ci se trouve à 3 500 mètres d'altitude, ce qui en fait l'une des villes les plus hautes du monde.

PHOTOGRAPHIE DE Brendan Hoffman, Nat Geo Image Collection

Entouré par les chaînes de montagnes du Karakoram et de l'Himalaya, avec ses lacs turquoise et ses monastères bouddhistes d'obédience Mahāyāna, ce paradis alpin est devenu une escapade « instagramable ».

« Maintenant, nous avons plus de touristes, mais ils ne sont pas intéressés par ce que le Ladakh a à offrir en termes de culture ou d'aventure. Ils veulent juste prendre des photos au lac Pangong ou monter à dos de chameau dans la vallée de la Nubra et rentrer chez eux, sans avoir vraiment vu quoi que ce soit », regrette Rigzin Kalon qui a construit un hôtel de charme sur les terres de ses ancêtres dans la vallée de la Nubra.

Behzad Larry, défenseur de la panthère des neiges, affirme que le Ladakh est passé d'une terre d'agriculture vivrière, avec toilettes sèches, où le plastique était encore absent, à un cauchemar écologique. Avec les émanations nocives des décharges encombrées, l'épuisement des nappes phréatiques et les crues soudaines sans précédent, les dommages causés aux écosystèmes l'emportent largement sur les avantages économiques qu'en retirent les communautés locales.

Néanmoins, au milieu de la frénésie de construction faisant émerger chaque saison de nouveaux hôtels de plus en plus grands, brille désormais une lueur d’espoir qui prend la forme d'écolodges et d'hôtels de charme, créés et gérés par des personnes engagées en faveur de l’environnement et de la communauté. Cela s'est traduit par un retour à l'architecture traditionnelle : des constructions basées sur la technique du pisé, avec des pierres et du bois présents localement et dont on sait qu'ils isolent les maisons en hiver, contrairement aux structures modernes en ciment et en béton.

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    La salle à manger du Stok Palace Heritage Hotel propose des plats traditionnels ladakhis, notamment des momos et de la thukpa, des raviolis et de la soupe de nouilles tibétains.

    PHOTOGRAPHIE DE HH Jigmed Namgyal

    Ces activistes visent à préserver un mode de vie qui est en train de disparaître et à détourner l'attention des touristes de ce qui semble le plus attractif, tout en limitant les embouteillages. L'accent est également mis sur la transmission aux jeunes générations de compétences leur permettant de gagner leur vie afin d'enrayer l'exode rural vers des villes déjà surpeuplées comme Leh ou Delhi.

    Rigzin Kalon explique que les programmes de formation sont souvent adaptés aux femmes. « Par rapport à d'autres régions de l'Inde, les femmes ladakhis ont davantage leur mot à dire au sein de la famille et sont les principales décisionnaires. Donc, si je peux aider les femmes, l'argent [qu'elles gagnent] ira dans la bonne direction, vers l'éducation et le développement ».

     

    OÙ SÉJOURNER

    Le Stok Palace Heritage Hotel : la famille royale Namgyal réside toujours dans son palais vieux de 200 ans, dont une partie a été convertie en hôtel de charme avec quelques chambres seulement. Avec ses peintures murales et objets de famille soigneusement préservés, le palais de Stok est un excellent exemple d'architecture vernaculaire, entièrement construit par des artisans locaux. Outre le parrainage de l'éducation des enfants du village, la famille soutient et met en valeur l'artisanat et la culture traditionnels sous forme d'art, de musique, de danse et de tissage.

    Lchang Nang Retreat : surnommé « maison des arbres », cet hébergement presque entièrement alimenté par l'énergie solaire se trouve à l'intérieur d'un verger dans un petit village de la vallée de Nubra. Son propriétaire, Rigzin Kalon, explique que son objectif est de proposer une expérience complète d'écotourisme et de donner un aperçu de la cuisine, de la culture et de l'artisanat locaux. Outre les activités en pleine nature comme l'observation des étoiles et le vélo tout-terrain, les clients ont la possibilité de visiter des maisons locales, de boire du thé d'orge dans leur cuisine et d'apprendre les nuances de la gastronomie ladakhi.

    À environ 125 kilomètres de Leh, le monastère bouddhiste tibétain de Lamayuru, vieux de plusieurs milliers d’années, est l'un des plus anciens du Ladakh.

    PHOTOGRAPHIE DE Alex Treadway, Nat Geo Image Collection

    LUNGMĀR Remote Camp : ce camp installé au milieu de la faune sauvage est géré par Dorjay Stanzin et Abdul Rashid, ses propriétaires, deux défenseurs de l'environnement et pisteurs expérimentés. « Le tourisme responsable apaise les conflits entre l’Homme et la nature et protège non seulement les panthères des neiges, mais aussi l'ensemble de leur écosystème », déclare Behzad Larry qui s'occupe des ventes. Les propriétaires ont ouvert un autre camp dans un village voisin plutôt que d'ajouter des chambres à celui-ci afin de ne pas surcharger ces terres.

    Ladakh Sarai : Tara Mountain Sarai, situé dans la vallée sauvage et reculée du Zanskar, est le dernier établissement en date de Ladakh Sarai. L'idée derrière celui-ci était de disposer de moins de chambres et d’offrir la meilleure expérience. Le propriétaire Rigzin Namgyal a réparti ses camps dans tout le Ladakh, des chalets en terre crue à la périphérie de Leh aux tentes de luxe sur les rives du lac Pangong et dans la vallée de Nubra. Rigzin Namgyal affirme son engagement pour une meilleure gestion de l'eau et s'efforce de ne pas utiliser de combustibles fossiles dans l'ensemble de ses propriétés.

    Himalayan Farmstays : si vous souhaitez découvrir le mode de vie authentique des Ladakhis, choisissez l'un de ces séjours chez l'habitant mis en place par l'Himalayan Institute of Alternatives, Ladakh (HIAL). Vous pourrez y déguster des plats typiquement ladakhis, comme le croustillant khambir, une sorte de pain fait à partir du blé, et le chu-tagir, une soupe de nouilles à la viande et aux légumes, tout en dînant avec la famille dans la cuisine. Les visiteurs peuvent également participer aux travaux agricoles sur le petit lopin de terre attenant à la maison. Le réseau couvre désormais deux villages : Fiang, près de Leh, et Tarchit, à quelques heures de route.

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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