Sept découvertes archéologiques qui ont marqué l'année 2024
Qu’il s’agisse de cités mystérieuses ou de papyrus anciens déchiffrés grâce à l’intelligence artificielle, ces découvertes témoignent de l’efficacité des techniques nouvelles et anciennes pour réinventer l'archéologie.
Ce petit masque, fait d’une mosaïque de jade et de coquilles de spondylus en guise d’yeux et d’oreilles, est une manifestation du dieu maya de la tempête. On l’a découvert posé sur la poitrine d’un roi inhumé à Chochkitam vers l’an 350. C’est l’une des nombreuses découvertes archéologiques qui ont fait les gros titres en 2024.
De nos jours, on doit la plupart des découvertes archéologiques les plus importantes à l’application de techniques à des artefacts et à des restes humains déjà découverts : celles-ci nous ont par exemple révélé les détails d’une catastrophe survenue à l’âge du bronze ou bien l’identité du coupable dans une mystérieuse affaire de meurtre de l’Égypte ancienne.
Cette année n’a pas dérogé à la règle. En 2024, des méthodes modernes telles que l’analyse ADN et la télédétection ont révélé de nouvelles traces témoignant de l’existence de cultures, de techniques et de structures sociales passées. Mais si l’archéologie avance désormais souvent grâce à la science, elle n’en a pas moins besoin de fouilles nouvelles pour nourrir ses futures études.
Voici certaines des découvertes archéologiques les plus importantes de ces douze derniers mois.
1. LE LIDAR RÉVÈLE DES CITÉS CACHÉES PARTOUT DANS LE MONDE
Le lidar, acronyme qui signifie Light Detection and Ranging (« Détection et télémétrie par la lumière »), est un analogue du radar et du sonar qui scanne un terrain donné à l’aide de milliers d’impulsions laser émises chaque seconde. Si cette technologie existe depuis des décennies, sa capacité à détecter de vastes structures sous des couches de végétation et à cartographier des changements subtils au sein de paysages anciens a récemment révolutionné l’archéologie.
Des scanners réalisés grâce à la technologie du lidar révèlent les murs d’enceinte et les fortifications qui se dressaient autrefois à Tugunbulak, une cité médiévale récemment découverte sur la Route de la soie dans le sud-est de l’actuel Ouzbékistan.
À bord d’un petit avion équipé d’un lidar, les archéologues peuvent scanner de larges zones ; et cette technique s’est avérée particulièrement utile pour aller voir sous les jungles denses d’Amérique Centrale et du Sud. Parmi les découvertes dues au lidar cette année figurent : des villages mayas à Campeche, dans le sud du Mexique ; un paysage de jardins, de routes et de rivières en Amazonie équatorienne ; des ruines antiques dans les îles Tonga, dans le Pacifique ; et les vestiges de deux cités médiévales le long d’un itinéraire de la Route de la soie en Ouzbékistan.
2. TOMBEAUX, AMULETTES ET TRÉSORS EN ÉGYPTE
Les artefacts égyptiens sont pour partie à l’origine du développement de l’archéologie moderne, et l’on ne cesse d’en découvrir. Cet été, des chercheurs ont annoncé avoir mis au jour trente-trois tombes dans le sud de l’Égypte et soixante-trois dans le delta du Nil. À l’intérieur de celles-ci se trouvaient d’éblouissantes amulettes en or, des pièces de monnaie et de la poterie. Vieux d’environ 2 000 ans, ces nouveaux objets remontent aux périodes tardives de l’Histoire égyptienne, et les chercheurs espèrent qu’ils livreront les secrets des pratiques funéraires égyptiennes et plus généralement de cette époque du monde antique.
Des chercheurs ont également documenté la posture de travail pénible des scribes égyptiens et ont détecté un bras du Nil disparu voilà bien longtemps qui a désormais en grande partie séché et qui servit il y a plusieurs milliers d’années à acheminer les pierres qui servirent à la construction des pyramides de Gizeh.
3. UN TOMBEAU DÉSERTIQUE À PÉTRA
L’une des découvertes les plus remarquables ayant eu lieu cette année est celle de douze squelettes antiques dans une tombe située sous la Khazneh, à Pétra, site archéologique désertique de Jordanie connu pour ses structures sophistiquées sculptées dans des falaises de grès rouge. Selon les archéologues, des nomades, les Nabatéens, un des premiers peuples arabes, commencèrent à enterrer leurs morts à Pétra au quatrième siècle avant notre ère ; au deuxième siècle avant notre ère, Pétra devint la capitale nabatéenne, une cité alimentée en eau par un système complexe de citernes.
La façade spectaculaire de la Khazneh de Pétra peut laisser penser qu’elle abrite un édifice plus grand, mais cette structure est en réalité un tombeau nabatéen sophistiqué sculpté dans cette paroi rocheuse voilà 2 000 ans.
Cette année, des archéologues ont annoncé la découverte de douze squelettes enterrés sous la Khazneh. Dans ce complexe, peu de tombes contiennent des restes humains. Les chercheurs espèrent donc que cette découverte les renseignera davantage sur les Nabatéens.
Les colonnes sculptées de la Khazneh, qui signifie « trésor » en arabe, forment l’édifice le plus emblématique de la cité jordanienne. Son nom vient d’une légende selon laquelle la grande urne située au-dessus de sa façade cacherait un trésor précieux ; l’urne est d’ailleurs, elle aussi, faite de grès massif. Selon les archéologues, bien que cette légende ne soit que cela, la découverte de la tombe située sous la Khazneh est inestimable et les aidera à en apprendre davantage sur ce peuple disparu.
4. L’IA LIT DES PARCHEMINS BRÛLÉS LORS DE L’ÉRUPTION DU VÉSUVE
En février, des chercheurs ont annoncé avoir utilisé un système d’intelligence artificielle pour déchiffrer des parties illisibles d’un parchemin vieux de 2 000 ans brûlé lors de l’éruption du Vésuve en 79 de notre ère ; l’éruption volcanique qui anéantit Pompéi. Ce parchemin fait partie d’une collection de 1 800 papyrus en rouleaux découverts au 18e siècle parmi les vestiges d’Herculanum, cité romaine antique située à une quinzaine de kilomètres de Pompéi qui, selon les archéologues, aurait été détruite par une explosion de cendre, de roche et de gaz volcaniques à la chaleur inimaginable.
Les papyrus d’Herculanum font partie de la plus emblématique, de la plus inaccessible et de la plus vaste collection de manuscrits endommagés au monde. Cette année, l’IA a permis de révéler le contenu de l’un d’eux que l’on avait préalablement scanné aux rayons X.
L’éruption réduisit ces papyrus en amas carbonisés que l’on pensait illisibles. Mais des scientifiques ont scanné l’un de ces fragments aux rayons X et ont utilisé l’intelligence artificielle pour le déchiffrer. La découverte initiale comprend quinze colonnes de texte et plus de 2 000 caractères écrits, probablement écrits par un disciple du philosophe grec Épicure, qui se lisent comme une méthode expliquant comment profiter de la vie.
5. LA PLUS VIEILLE SELLE JAMAIS DÉCOUVERTE
Cette selle vieille de 2 700 ans a été découverte dans la tombe d’une femme dans le cimetière de Yanghai, à la lisière du désert du Taklamakan, dans le nord-ouest de la Chine. Bien que les humains aient domestiqué les chevaux des milliers d’années auparavant, des sculptures anciennes montrent qu’on les chevauchait généralement à cru ou bien en s’installant sur un tapis ou sur une couverture. Les selles constituent une avancée technologique ultérieure qui permit aux cavaliers de voyager sur de plus longues distances sans se blesser et sans nuire à leur monture.
Placée dans une tombe il y a plusieurs milliers d’années, la selle mise au jour à Yanghai est faite de cuir et d’un matelassage à base de paille et de poils d’animaux. Cet objet, qui témoigne d’un certain savoir-faire, était peu onéreux à fabriquer et servait aux gardiens de troupeaux de la région.
Les chercheurs pensent que l’équitation fut introduite en Chine depuis les régions septentrionales de l’Asie Centrale, mais la selle de Yanghai est la plus ancienne à figurer dans nos archives archéologiques. Celle-ci se compose de morceaux de cuir cousus ensemble et rembourrés avec de la paille et des poils d’animaux ; les composés organiques de ce type se décomposent généralement rapidement, mais dans ce cas précis, l’environnement désertique aride les a préservés.
6. MASQUE DE JADE ET AUTRES DÉCOUVERTES DANS UNE TOMBE MAYA
Un masque de jade décoré, fait de plusieurs fragments de jade imbriqués, avec des coquillages en guise d’yeux et de dents, a été découvert dans la tombe d’un roi maya à Chochkitam, au Guatemala. La datation au carbone 14 montre que celui-ci date de l’an 350 de notre ère environ et ses découvreurs pensent qu’il figure un dieu maya de la tempête. Il n’était pas rare que l’on confectionne de tels masques pour les sépultures des membres de la famille royale maya. Des gravures réalisées à l’aide d’un couteau ou d’un ciseau en obsidienne volcanique ornaient également le tombeau de ce roi.
D’autres avancées liées aux Mayas ont été annoncées cette année, notamment une analyse génétique effectuée sur des victimes sacrificielles découvertes près de la cité ancienne de Chichén Itzá, au Mexique, mais aussi la mise au jour sur un autre site guatémaltèque d’un dépôt de restes humains brûlés susceptible d’indiquer un changement politique.
7. LES ORIGINES DE L’ « AUTEL » DE STONEHENGE
Stonehenge, monument néolithique du sud-ouest de l’Angleterre, a beau avoir atteint la célébrité dès le Moyen Âge, cela ne nous empêche pas, grâce à de nouvelles techniques, de continuer à découvrir des détails concernant sa construction. En août, des chercheurs ont remarqué que l’autel en pierre près du centre de la structure était fait d’un grès qui vient d’Écosse, à des centaines de kilomètres de Salisbury Plain, où il fut érigé en monument. Un tel acheminement représentait très certainement une entreprise de taille il y a 4 600 ans, date à laquelle les archéologues pensent que la pierre fut installée : celle-ci pèse plus de six tonnes et ceux qui la déposèrent là ne se servirent probablement pas de roues.
On savait que les pierres que les humains du Néolithique avaient utilisées pour construire Stonehenge provenaient de divers endroits en Angleterre et au Pays-de-Galles. De nouvelles recherches montrent que l’autel en pierre au centre du cercle pourrait provenir d’Écosse.
Des études antérieures ont montré que les gigantesques pierres de sarsen érigées à la verticale dans le cercle principal ont été découpées dans du grès provenant des environs, mais les pierres calcaires en son sein ont été importées du sud-ouest du Pays-de-Galles, à plus de 150 kilomètres de là. Les parties les plus anciennes de Stonehenge datent d’il y a 5 000 ans environ ; les chercheurs pensent aujourd’hui que le monument servait à l’origine de lieu de sépulture mais qu’il fut étoffé pendant des milliers d’années jusqu’à devenir un monument religieux néolitihique.
Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.